La reconversion, parent pauvre des politiques d…
Grâce aux objets connectés, aux données remontées et aux techniques de traitement (Big Data), la maintenance des infrastructures de transport devient prédictive et se trouve transformée.
Grâce aux objets connectés, aux données remontées et aux techniques de traitement (Big Data), la maintenance des infrastructures de transport devient prédictive et se trouve transformée. Le contrôle des infrastructures peut se faire à distance et en temps réel, permettant ainsi un maintien en condition opérationnelle optimal et de nouveaux services.
Les objets connectés ont envahi notre quotidien. A la maison, dans la poche, au poignet, ils sont omniprésents. Pourtant, ceci n’est que la face émergée de l’iceberg car ce sont bien les applications industrielles qui constituent la majeure partie du marché. Et cette tendance devrait perdurer : le B2B pourrait représenter le double du marché B2C d’ici 2021, c’est à dire dépasser les 980 milliards $ [1] de chiffre d’affaires, sur un total estimé à 1 400 milliards $.
Dans les applications industrielles, le marché du transport devrait représenter 16% du marché de l’IoT en Europe. Ces dépenses sont réparties entre les véhicules connectés et les infrastructures, pour lesquelles les applications de maintenance offrent de grandes opportunités en termes de coûts et de qualité (sécurité notamment) pour les acteurs du marché.
La maintenance corrective est déclenchée suite à une rupture de service, ou à une détérioration de la qualité de service. Ce qui implique nécessairement que l’usager subisse un dérangement, le temps que le mainteneur en soit averti, procède à son diagnostic, et rétablisse le service. Dans le cas des transports, cela est alors synonymes de retards voire des trajets annulés et donc de préjudice fort pour le client.
Pour la maintenance, le technicien dispose de plusieurs moyens : du simple redémarrage à distance à la réparation sur site de l’équipement en panne ou défaillant, ou son remplacement par un ‘spare’ et son envoi en réparation en atelier.
La maintenance préventive quant à elle, est déclenchée sur un service en amont de sa défaillance et peut être de deux types :
• Systématique, c’est-à-dire planifiée à une fréquence prédéfinie. Ce type de maintenance est notamment appliqué sur les matériels soumis à des obligations légales, tels que les systèmes de sécurité des tunnels ou certains éléments ferroviaires embarqués.
• Conditionnelle / Prédictive, c’est-à-dire soumise à un test préalable (des conditions météorologiques extrêmes peuvent par exemple déclencher des tournées pour s’assurer que l’infrastructure n’a pas subi de dommages), ou une remontée d’alarme de supervision (courbe d’intensité anormale au niveau d’un moteur électrique tel que celui d’un escalator par exemple).
Dans ces différents cas, la maintenance préventive permet la continuité – ou a minima une interruption limitée – du service et préserve ainsi la qualité de service rendue à l’utilisateur.
Néanmoins, mettre en place une stratégie de maintenance prédictive doit se faire à l’aune d’une étude d’impact organisationnel et financier. En effet, une fréquence de tournées de maintenance trop élevée peut devenir synonyme de sur-qualité ou de mauvaise allocation des ressources, certaines tournées s’avérant inutiles. Tout cela représentant alors d’importants surcoûts pour les gestionnaires d’infrastructures, d’autant plus dans le cas de certaines interventions préventives allant jusqu’à nécessiter une interruption du service, directement dommageable pour l’exploitant mais également pour les usagers / clients. Pour éviter ces écueils au maximum, une solution apparaît comme évidente : l’utilisation de la donnée (collectée par des relevés terrain ou une supervision à distance) et une analyse fine des conditions d’occurrence des pannes.
Et c’est au niveau de cette collecte de donnée que l’IoT vient apporter un nouveau champ des possibles. En effet, avec l’émergence de nouveaux objets et de nouvelles technologies, pour la plupart facilement déployables et à des coûts de plus en plus abordables, il devient de moins en moins complexe d’équiper ses installations de capteurs et de remonter les informations à distance.
Grâce à l’IoT, de multiples capteurs peuvent donc fournir un grand nombre de données : température, pression, intensité électrique, luminosité… Ces données deviennent sources de valeur à condition d’être exploitées correctement. L’utilisation de la datascience, de techniques de machine learning et de Big Data, permettent l’émergence de nouveaux modèles statistiques prédictifs et viennent compléter ce que permet l’IoT dans la collecte de la donnée.
En corrélant les évènements avec l’état des infrastructures, et en se basant sur des données représentatives, il est alors possible de déterminer les causes et l’occurrence des défaillances et ainsi anticiper les pannes. La maintenance peut alors se faire au plus juste et assurer la fiabilité des systèmes tout en offrant une disponibilité maximale.
De plus, en donnant une visibilité continue et en temps réel de l’état des infrastructures, l’IoT a favorisé l’apparition de centres de contrôle disposant d’outils de supervision de l’ensemble des réseaux. Le suivi à distance des activités et des ressources pallie donc les limites de la maintenance préventive systématique. En effet les tournées d’inspection sur le terrain deviennent superflues et les opérations de maintenance ciblées peuvent alors se concentrer sur les tâches à forte valeur ajoutée (interventions d’urgence, remplacements critiques ...). Le temps de réaction s‘en retrouve également réduit.
Cela s’illustre par exemple au niveau des infrastructures ferroviaires. En effet, SNCF, qui remplaçait systématiquement ses équipements juste avant la fin de leur durée de vie théorique, souhaite désormais les remplacer seulement lorsque cela devient nécessaire et ainsi limiter les problèmes de sécurité pour les pièces qui s’abîment avant l’heure mais aussi optimiser la durée de vie des installations. Autre exemple, le déploiement, toujours par SNCF, de 6 stations permettant la visualisation à l'aide de caméras des pantographes des trains et analysant les images grâce à un logiciel doté d’IA, capable de détecter des anomalies de moins d'un millimètre, invisibles pour les techniciens. La mise en place d’un tel contrôle, réellement novateur représente un réel gain - à la fois financier, temporel, humain et sécuritaire. En effet, un défaut de pantographe pouvant provoquer une chute de ce dernier en entrainant jusqu'à 1,5 kilomètre de câbles, leur contrôle préventif permet alors un remplacement évitant les dégradations du réseau.
Les bénéfices de la maintenance prédictive sont prometteurs et la méthode se démocratise aujourd’hui dans les différents secteurs. Mais malgré la facilité grandissante de déploiement de capteurs, la mise en place d’une solution complète et satisfaisante se révèle complexe dès lors qu’il s’agit des métiers, des applications ou des process : Quels objectifs métiers servir ? Quelles données relever et à quelle fréquence ? Quel choix technologique mettre en place (capteurs, systèmes de communication, cybersécurité, plateformes / outils de supervision …) ?
A travers l’observation de différents cas d’usage de l’utilisation des objets connectés dans la maintenance des infrastructures de transport, de premières pistes de réponses peuvent être identifiées.
Dans le domaine aéroportuaire, la gestion des ressources mobiles se déplaçant au sein de l’aéroport se révèle être un véritable défi. L’opérateur de l’aéroport de Manchester (M.A.G : Manchester Airports Group) doit ainsi contrôler l’état du matériel d’une vingtaine d’agents de manutention différents et s’assurer que chaque véhicule utilisé dispose des autorisations pour circuler. Dans un souci de conformité à la réglementation, de sécurité et de facilité d’accès à l’information, une solution de gestion et de suivi de ressources (Fleet management et Assets Tracking) a été mise en place. Afin de s’assurer de la validité des certificats de maintenance, il était nécessaire de vérifier manuellement les documents des différents fournisseurs. La perte de temps liée à la recherche d’information était alors importante et le processus manquait d’efficacité. Avec la nouvelle solution basée sur les nouvelles technologies, un QR code est présent sur chaque équipement et donne accès à une page produit disponible sur une plateforme. La remontée des informations est alors facilitée en offrant la possibilité de signaler les défauts ou de faire des remarques sur la page produit. Ainsi l’opérateur dispose dans un unique endroit d’une vision complète de l’historique et de l’état des ressources lui permettant d’améliorer la planification de la maintenance et d’avoir une meilleure vision sur l’utilisation réelle des ressources. Afin de permettre l’accès aux informations à chaque instant, la plateforme est hébergée sur le cloud et un système de synchronisation permet un fonctionnement sans connexion.
De nouveaux usages sont actuellement à l’étude afin d’élargir le domaine d’application en équipant par exemple les véhicules de puces RFID permettant de tracer le déplacement des véhicules et d’automatiser la gestion des autorisations.
Dans le cadre de l’optimisation de la maintenance de ses aires de repos, Vinci Autoroute a décidé de mettre en place une solution de maintenance connectée sur « l’aire test » de Boutroux (Eure et Loire). La solution s’appuie sur un réseau de capteurs reliés au cloud par un réseau longue distance LoRa pouvant alors remonter tous types d’informations et d’indicateurs sur l’état des infrastructures et des équipements (usages des sanitaires, taux de remplissage des containers, ouverture de l’aire de repos, température). Les premiers résultats indiquent une meilleure réactivité et une meilleure gestion des opérations de maintenance permettant de maintenir un meilleur niveau de services.
Ce projet est encore à l’étape de POC [2] mais une fois la validité et la pertinence du projet démontrées, le déploiement de la solution à grande échelles va soulever de nouvelles problématiques à appréhender : formation à la prise en main des nouveaux outils et processus, gestion et choix des technologies à grande échelle, construction d’un business model robuste et pérenne …
Enfin, preuve de l’avantage concurrentiel que revêt l’apport de l’IoT, Sanef a également pris le train de l’IoT en concluant un partenariat avec Objenious afin de connecter l’ensemble d’un tronçon d’autoroute d’environ 80 km (axes de circulation, stations-service & aires d’autoroute). De la même manière, l’objectif est ici de recueillir la satisfaction des clients ; suivre à distance les consommations d’eau, remplissages des bennes ; remonter les chocs sur dispositifs de sécurité … Le tout visant à optimiser les tournées de maintenance des opérateurs.
Dans le cadre du concours French IoT organisé par le groupe La Poste, la RATP, en tant que partenaire de la catégorie Transport et mobilité individuelle, se met en relation avec un réseau d’industriels et de start-ups afin de trouver des réponses à ses problématiques industrielles.
Le transporteur a notamment retenu la start-up Wavely sur des applications de maintenance : cette-dernière a développé une solution d’analyse de défauts et de pannes à partir de capteurs de bruit. Selon Thomas de Lacoste, Responsable Connectivité et Internet des Objets de la RATP, cette technologie apporte un vrai plus pour la maintenance des infrastructures du groupe car elle permet de « détecter des défauts que, visuellement ou par certaines analyses, on ne pouvait pas observer » [3]
La RATP envisage également de calculer la charge des rames en temps réel, pour à la fois développer des services aux voyageurs (taux de remplissage du prochain métro par exemple) et mieux connaitre les sollicitations de son matériel roulant. Ce dernier point lui permettant d’optimiser la planification des opérations de maintenance.
Enfin, la RATP a également noué un partenariat avec la start-up nantaise Novyspec, spécialisée dans le développement de l’inspecteur industriel augmenté. En effet, cette-dernière fournit à ses clients une plateforme IoT permettant de faciliter les tournées d’inspections en se basant sur l’analyse d’images (vidéos, photos …).
Ce programme lancé en 2013 comporte une vingtaine de projets autour de la plateforme SAP Hana, connectée en temps réel à tous les acteurs du port, ainsi qu’aux capteurs déployés sur les infrastructures critiques. Les contraintes mécaniques subies par les ponts, aiguillages maritimes, etc. sont par exemple monitorées. Ainsi, lorsqu’une intervention est demandée à un agent, le système lui indique même les pièces défectueuses, afin que l’agent en prévoie en rechange avant de partir sur le terrain, ce qui évite de faire 2 interventions (un diagnostic et une réparation), avec des trajets improductifs entre les deux.
Ainsi, la durée de vie des infrastructures s’en retrouve augmentée et la probabilité d’occurrence d’anomalies ou de pannes qui pourraient influencer (négativement) le bon fonctionnement du port sont drastiquement réduites. Comme expliqué précédemment, la maintenance intelligente permet de monitorer non seulement les contraintes techniques mais également l’utilisation générale et l’usure des installations. Cela favorisant une détection en amont des dommages et permettant d’importantes économies via l’anticipation des achats nécessaires et des ruptures de service.
Enfin, d’autres projets orientés Smart City tel que le déploiement de réverbères intelligents (et donc connectés) permettront évidemment des gains énergétiques mais également un suivi plus complet de ces installations et une durée de vie augmentée.
Grâce aux objets connectés, aux données remontées et aux techniques de traitement (Big Data), la maintenance des infrastructures de transport devient prédictive et se trouve transformée. Le contrôle des infrastructures peut se faire à distance et en temps réel, permettant ainsi un maintien en condition opérationnelle optimal et de nouveaux services. Cependant, l’utilisation des objets connectés ne doit pas se faire au détriment de la sécurité des infrastructures. Avec l’augmentation du nombre de connexions et l’ouverture des données, le risque cyber devient bien réel et celui de remontée de mauvaise(s) donnée(s) augmente, au même titre que ceux liés aux potentiels dysfonctionnements de la chaine communicante. La mise en place réfléchie d’une architecture robuste adaptée aux besoins métier est donc nécessaire pour toute entreprise de transport souhaitant profiter pleinement du potentiel des objets connectés. Pour ce faire, les problématiques techniques devront être analysées en amont et les impacts et besoins organisationnels et humains devront être méthodiquement intégrés afin de garantir une adhérence maximale des ressources humaines inhérentes aux différents projets lancés.