La reconversion, parent pauvre des politiques d…
Le smart charging est l’ensemble des technologies qui permettent de charger la batterie d’un véhicule au meilleur coût et au meilleur moment pour l’utilisateur.
Ces technologies innovantes favorisent le développement des énergies renouvelables et la maitrise économique d’une entreprise qui mettrait en place une flotte de véhicules électriques.
Dans sa forme la plus aboutie, le smartcharging peut être « bidirectionnel ». L’énergie peut aller dans les deux sens : du véhicule vers le réseau, et du réseau vers le véhicule. On parle alors de Vehicle-to-grid ou « V2G ». Le V2G offre ainsi la possibilité de piloter à distance sa charge et sa décharge et la batterie sert alors de stockage.
Cette technologie est développée par Dreev, co-entreprise créée entre EDF et NUVVE. Dreev compte déjà à son actif des premières réalisations commerciales en France et en Angleterre. Elle intervient également dans le programme EV100 qui vise à électrifier 100% de la flotte de véhicules légers du groupe EDF d’ici 2030.
Sia Partners a rencontré Eric MEVELLEC, Directeur Général de Dreev, avec pour objectif d’en apprendre davantage sur l'émergence des modèles d'affaire relatifs au Vehicle-to-Grid.
Pouvez-vous nous décrire l’activité de votre entreprise sur le marché du V2G ?
Un véhicule électrique, à l’instar d’un véhicule thermique, est statique la très grande majorité du temps (environ 96% du temps). Nous proposons à nos clients de « prendre la main » sur la gestion de leur batterie dès lors qu’ils n'utilisent pas leur véhicule, et d’exploiter le gisement que représente cette batterie. Ainsi nous pouvons apporter un service au système électrique, en dégager des revenus et les partager avec nos clients. Dans nos offres vers les clients, nous nous engageons jusque 20€ par mois et par véhicule.
Le potentiel dormant sous les capots des véhicules électriques au sein de cet « asset » qu’est la batterie est assez impressionnant si on croit les différentes trajectoires estimées par RTE ou l'ADEME.
Nous ne différencions pas fondamentalement une recharge sur le lieu de résidence d’une recharge en parking d’entreprise. La chaine technique et le gisement de valeur resteront les mêmes. Par contre les modes de ventes et l’expérience client n’auront bien sûr rien à voir !
Nous faisons la démonstration de notre modèle auprès des entreprises. Notamment car les technologies à employer, et notamment les bornes de recharge compatibles V2G, correspondent plus aux équipements que les entreprises ont l’habitude de mettre en œuvre.
Aujourd'hui, l'approche de Dreev repose sur un modèle intégré, de la borne à l'application.
L’objectif est de pouvoir passer à l’échelle et proposer la technologie V2G demain au plus grand nombre, via des partenariats. Cela implique d’organiser des maillons d'une chaîne de valeur très étendue: Conseil, installation, maintenance, et pilotage des bornes, valorisation sur les marchés, facturation, relation client et service après-vente sont des métiers qui requièrent des compétences totalement différentes. Nous sommes très ouverts en termes de partenariats à l’externe, et nous avons aussi la chance de disposer d’acteurs forts au sein du Groupe EDF. Par exemple en France, IZIVIA est un CPO (Charge Point Operator ou opérateur de bornes de recharge) qui se positionne sur des activités de prospection, vente et déploiement de bornes et nous sommes en train de structurer une offre. A l’autre extrémité de la chaine de valeur, Agregio est un agrégateur au travers duquel nous pouvons mettre en œuvre des stratégies différenciantes de valorisation de nos services.
Aujourd’hui, comment voyez-vous la concurrence entre les différentes technologies sur le marché ? Des évolutions technologiques sont-elles attendues ou espérées ?
Globalement, les technologies sont aujourd’hui matures et la convergence des normes et protocoles est en bonne voie. Il n'y a plus de point dur en termes de faisabilité technique. Toutefois l’industrialisation, la professionnalisation et l’organisation de l'écosystème et des règles du jeu sont encore en grande partie devant nous.
D’un point de vue technologique, on peut distinguer deux grandes solutions qui vont durablement cohabiter, avec chacune leurs avantages et leurs inconvénients.
Le courant électrique du réseau est alternatif, alors que celui des batteries est continu. La borne ou le véhicule doivent donc pouvoir convertir le courant alternatif en courant continu, et le continu en alternatif pour obtenir le caractère bidirectionnel. Cette fonction de conversion peut être réalisée dans la voiture -auquel cas la puissance de charge sera limitée pour des questions de points, de coûts, …-ou dans la borne -auquel cas la borne est un peu plus chère, mais permet de recharger plus rapidement-. Les deux solutions ont leurs avantages et leurs inconvénients, mais sont assez complémentaires.
Quels sont les principaux freins à date pour une adoption massive et quelles sont les conditions de réussite ?
Si nous prenons l’hypothèse que dans deux ou trois ans la technologie et son prix ne seront plus problématiques et que les conditions de marché sont réunies, il restera un frein potentiel pour un passage à l’échelle : l'engagement et l'adhésion du client. Il faut en effet rassurer et convaincre : un véhicule même électrique reste un véhicule, et pas une batterie ; Nous ne devons pas l’oublier, nous devons assurer la charge dont le client a besoin 365 jours par an, et nous devons packager notre produit dans une proposition client simple. Le principal levier sera-t-il que x euros soient dégagés en fin de mois? Ou sera-t-il la participation à la transition énergétique ? Comment gagner l'adhésion fluide et spontanée des clients à une solution encore trop cantonnée à un débat technique d’experts ? Comment packager les services pour rendre l’offre attractive et son appropriation simple ?
Si techniquement le V2G sera rendu possible par la coopération entre acteurs, ce sera également le cas d’un point de vue de la proposition client : l’écosystème doit s’organiser et trouver un modèle dans lequel chaque partie trouve son intérêt, et en premier lieu le client.
« J'ai passé la première partie de ma carrière dans le secteur de l'automobile, où j'ai parcouru la chaîne de valeur, de la production à vente, en tant que gestionnaire grands comptes. Puis j’ai intégré la Direction Marketing d’une entreprise de produits géni-climatiques, où j'ai pu aborder les questions de gestion de l'énergie, de compteur communiquant, etc. J’ai alors rejoint EDF, au sein de sa filiale Edelia pour y tester des modèles d’affaires sur l’effacement diffus. En 2016, j’ai participé à la création de Sowee comme Directeur IoT (notamment sur le produit Station Connectée), avant de rejoindre Dreev en janvier 2019. Si l’on prend du recul, ce parcours fait sens par rapport à la thématique de la mobilité électrique, qui est à la confluence des mondes de l’automobile, de l’internet des objets, des services et de l’énergie ! »
DREEV est une co-entreprise créée entre EDF Pulse Croissance et la start-up californienne NUVVE et dont le principe avait été annoncé lors du lancement du Plan Mobilité Electrique d’EDF en octobre 2018. Ce Plan vise à faire du groupe EDF un leader de la mobilité électrique, notamment dans le domaine du « smart charging », sur ses quatre grands marchés en Europe : France, Royaume-Uni, Italie et Belgique.
Le coeur d’activité de la nouvelle filiale, DREEV, est le développement de solutions « Vehicle-to-Grid » (V2G), qui constitue le volet à la fois le plus innovant et le plus prometteur du « smart charging ». La technologie proposée par DREEV a été développée par la start-up NUVVE et a déjà fait ses preuves à travers le monde. DREEV s’adresse aux flottes d’entreprises et aux collectivités.