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Le podcast : quels enjeux et opportunités de monétisation ?

L’industrie du podcast connaît un essor fulgurant outre-Atlantique. Avec près d’un quart de la population américaine qui en consomme régulièrement et un accroissement continu des audiences , ...

L’industrie du podcast connaît un essor fulgurant outre-Atlantique. Avec près d’un quart de la population américaine qui en consomme régulièrement et un accroissement continu des audiences (1*), le podcast représente une formidable opportunité pour les annonceurs en quête de nouveaux espaces publicitaires. Toutefois, cet engouement pour l’industrie du podcast en est encore à ses balbutiements en France, où les annonceurs demeurent sceptiques face à l’absence de standards de mesure susceptibles de les rassurer sur les réelles performances de cette nouvelle forme de programmes audio. Par conséquent, les créateurs de podcasts peinent à monétiser leurs contenus malgré la progression des audiences.

Le podcast ou la délinéarisation de la consommation des programmes audio

Le podcast, terme issu de la contraction des deux mots iPod et broadcast, est un fichier audio numérique qui peut être téléchargé ou écouté en ligne. Il prend souvent la forme d’une émission audio périodique dont les différents épisodes s’articulent autour d’une thématique ou d’un champ d’expertise précis.

Réservé jusqu’alors aux médias radiophoniques qui mettent à disposition de leurs auditeurs leurs propres émissions (2*) sous format de podcast, de nouveaux acteurs non radiophoniques ou encore indépendants ont émergé, proposant de nouveaux contenus et de nouvelles plateformes d’hébergement. En effet, plusieurs sociétés spécialisées dans la production de podcast ont vu le jour récemment, à l’instar de Binge Audio ou BoxSons. Ces derniers sont concurrencés par des acteurs déjà installés qui ont lancé leur propre offre, tels que Slate.fr avec sa rubrique Transfer, le géant Amazon à travers sa société Audible ou le précurseur Arte Radio. De la même manière, les services d’hébergement se diversifient (Deezer, SoundCloud, Apple Podcasts,…).

Ainsi, ce nouveau format audio a non seulement permis aux acteurs traditionnels de poursuivre leur mutation digitale mais il a également contribué à l’élargissement de l’écosystème digital audio pour inclure de nouveaux acteurs, qu’ils soient pure players, auteurs et producteurs de contenus, éditeurs des services de streaming à la demande ou distributeurs de contenus.

From binge watching to binge listening

A l’image de la Vidéo à la demande (VoD), le podcast vise à délinéariser l’accès aux programmes afin de libérer l’auditeur de la contrainte horaire de la diffusion et s’adapter à son envie de consommer de l’audio partout, à n’importe quelle heure et sur n’importe quel device.

L’audio à la demande rend donc possible une consommation de l’audio plus flexible, plus intime et plus adaptée aux modes de vie actuels. De plus, le contenu même des podcasts rompt avec la ligne éditoriale traditionnelle des médias radiophoniques. En effet, ce format s’affranchit des contraintes des médias de masse pour proposer des contenus originaux, plus approfondis, plus personnalisés et plus orientés à destination d’un public cible avec qui se crée un lien d’intimité au fil des épisodes.

De ce fait, en réinventant l’offre audio et en bénéficiant des évolutions technologiques, le podcast est parvenu à susciter un réel engouement, notamment auprès d’une audience urbaine, jeune, éduquée et CSP+.

La progression des audiences est-elle suffisante pour gagner l’adhésion des annonceurs ?

Avec 39% (3*) des Français qui ont déjà écouté un podcast et une progression continue des audiences, cette mutation de la diffusion audio pourrait représenter un réel potentiel économique via la monétisation des contenus podcastés. Et ce d’autant plus que le marché français de la publicité digitale a augmenté de 12% pour atteindre 4,1 Md€ en 2017 (4*), une tendance qui devrait se poursuivre.

Toutefois, malgré son potentiel, le marché publicitaire du podcast peine à émerger : l’absence de mesures statistiques, d’outils de monétisation standardisés, ou encore la fragmentation des acteurs du secteur et des plateformes de distribution font que l’industrie du podcast en France a encore un long chemin à parcourir avant de pouvoir convaincre les annonceurs.

Dans cette logique, l’attractivité du marché serait décuplée si les podcasteurs pouvaient annoncer des dizaines de millions de téléchargements/d’écoutes en ligne à monétiser, plutôt qu'à peine quelques centaines ou milliers. Or, pour le moment, les contenus sont disséminés sur une multitude de plateformes et, par conséquent, l’audience des podcasts est fragmentée. L’existence de plateformes qui fédèrent la distribution de podcasts semble donc conditionner la monétisation efficace des contenus.  

De surcroît, cette fragmentation des audiences sur plusieurs plateformes rend difficile la conduite de statistiques fiables sur l'écoute des podcasts et des éventuelles publicités qu'ils incluent, et ce d’autant plus que les nombreux acteurs utilisent des méthodes de décompte différentes pour les écoutes. C'est d'ailleurs sans compter l'émergence de plateformes tierces, comme SoundCloud ou Spotify, qui permettent désormais de diffuser des podcasts, avec leurs propres statistiques d'écoute à harmoniser et agréger. Les différents acteurs vont donc devoir trouver un standard de mesure commun qui permet à l’annonceur de suivre et d’évaluer la performance de son action publicitaire.

Trouver un modèle économique viable

L’adoption de mesures communes permettrait ainsi aux podcasteurs de monétiser leur contenu auprès des annonceurs et d’aller au-delà des modèles de financement adoptés jusqu’ici, à savoir les offres d’abonnement payant et le crowdfunding.

Si les méthodes classiques pour introduire de la publicité semblent inadaptées au vu des spécificités inhérentes au format podcast (par exemple, placer de la publicité en pré-roll dans un podcast écouté des mois plus tard rend l'opération marketing obsolète), des solutions plus appropriées sont à explorer.

L’une des stratégies plébiscitées outre-Atlantique est celle du sponsoring ou du native advertising qui consiste à intégrer une marque dans le contenu du programme en annonçant le sponsor ou en lisant le script de la publicité. Cette méthode permet à l’annonceur de déjouer les adblocks, de profiter de la notoriété du programme et de la relation de confiance qui se noue entre le podcasteur et l’auditeur.

D’autre part, le Brand content permet aux podcasteurs de développer des contenus avec leurs partenaires qui les hébergeront ensuite sur leurs sites, à l’instar de Binge Audio qui a produit des séries de contenus pour la Ville de Paris, la BNP ou encore l'Université de Paris-Saclay. D’un point de vue annonceur, cette stratégie s’inscrit dans une logique à long terme avec pour objectif principal la construction d’une proximité avec le client pour renforcer l’engagement. De plus, le brand content peut être une réponse intéressante aux enjeux de brand safety dans la mesure où cette méthode permet à l’annonceur de contrôler le contexte de diffusion de la publicité, évitant ainsi à la marque d’être associée à des contenus préjudiciables pour son image.

Les podcasts doivent maintenant développer une réelle stratégie marketing qui s’accompagne d’outils de mesure d’audience et de suivi de performance harmonisés et fiables afin de convaincre les annonceurs d’adopter ce nouveau canal publicitaire à l’image de leurs confrères américains.

 

Notes :

(1*) The Podcast Consumer 2017 

(2*) Cette offre comprend à la fois les podcasts natifs, c’est-à-dire des émissions qui naissent directement en numérique  sans passer par l’antenne, et du replay qui correspond  à des émissions déjà diffusées à l’antenne.

(3*) Sondage Opinionway Pour Audible - L'audio Dans Les Pratiques Culturelles Des Français  

(4*) Observatoire De L'e-pub : Les Chiffres Clés De La Publicité Digitale En 2017

Sources :