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Le Brexit et les différentes annonces de banques européennes et internationales ont poussé la Banque Centrale Européenne (BCE) à migrer certaines de leurs activités et employés depuis Londres vers l’Europe.
La BCE a alors émis en août 2018 un certain nombre de préconisations à observer dans la conduite de ces migrations, en particulier sur la façon dont les banques enregistrent leurs opérations entre les différentes entités d’un groupe (leur booking model en anglais) et la manière dont les risques sont gérés et partagés entre ces entités.
La BCE attend maintenant que les banques sujettes au Single Supervisory Mechanism[1] (SSM) appliquent ces préconisations, indifféremment des potentielles migrations liées au Brexit. De plus, ces dernières sont fortement encouragées à documenter précisément et à soumettre à la BCE leur politique globale en matière de booking pour s’assurer que les principes sont bien appliqués ou, à défaut, qu’un plan de remédiation sera mis en place.
C’est donc à un audit généralisé au niveau européen qu’il faut potentiellement s’attendre, certaines banques ayant déjà démarré l’exercice.
Même si la BCE n’a pas communiqué de calendrier ni de préconisations officiels sur cet exercice de documentation du modèle de booking, il est probable que cette demande survienne régulièrement dans les deux ou trois prochaines années, en priorité auprès des banques considérées comme systémiques.
Il faut également noter que certaines banques en Europe se sont déjà engagées à communiquer ces éléments à la BCE avant la fin de l’année 2019.
Dans la mesure où les grands acteurs bancaires en Europe évoluent dans un contexte transfrontalier, où les réglementations, la culture du risque, le marché ou encore les architectures systèmes peuvent être très différents, l’exercice d’analyse et de documentation d’une politique globale du booking model peut s’avérer très complexe.
Il est peut-être ambitieux de prévoir quels seront les axes que les superviseurs auront en priorité dans leur collimateur, mais il est prudent de supposer qu’a minima la BCE prêtera toute son attention aux points suivants :
En premier lieu la structure du groupe entre maison-mère, succursales et filiales ; mais aussi les activités et les clients visés dans les différents pays d’un réseau bancaire. Egalement, on peut supposer que la BCE s’attend à comprendre la répartition entre le modèle de coverage et le modèle de booking en Europe (i.e. les capacités de vente et d’expertise produit par pays, les entités du groupe qui portent les opérations à leur bilan contre celles qui transfèrent le risque vers le bilan de la maison-mère, sous le principe d’un hub européen).
Il conviendra de définir a minima les éléments suivants :
Les banques devront probablement démontrer qu’une cartographie consolidée et centralisée de l’ensemble des réglementations auxquelles elles sont soumises existe, ainsi qu’une cartographie détaillée des process appliqués pour mettre en œuvre ces réglementations.
Une attention particulière pourrait être portée aux obligations en matière de reporting (sur les transactions par exemple), ainsi que sur la répartition des rôles et responsabilités entre les équipes de conformité et les équipes métier.
Dans quelle mesure l’architecture IT du groupe est-elle intégrée ? Existe-t-il de nombreux systèmes, en particulier en matière de gestion des risques ou de consolidation financière ?
Les établissements européens devraient être en mesure de prouver que les politiques commerciales, financières et de gestion du risque répondent à des critères cohérents et harmonisés au sein d’un même groupe. De plus, le nombre et le contenu des procédures existantes devraient être suffisants pour documenter et assurer le respect des différents process liées au booking.
Une documentation des normes comptables appliquées dans les différents pays et le processus de consolidation au niveau Groupe sera sûrement une étape importante de cet exercice.
Egalement, les accords de partage de revenus mis en place entre les entités d’un groupe pourront être passés en revu.
Devant la complexité d’une telle démarche, il est urgent pour les banques potentiellement concernées de bien mesurer l’ampleur des travaux à réaliser. Au-delà d’une simple documentation des processus et procédures existantes, il est probable que la BCE effectuera un travail d’analyse de fond et s’attardera à vérifier que les risques bancaires, au niveau européen, sont maîtrisés et respectent le cadre réglementaire souhaité par les superviseurs européen.
[1] Cadre législatif et institutionnel qui permet la supervision des établissements bancaires en Europe. Les banques les plus importantes (114 en Europe et qui représentent plus de 80% des actifs en circulation) dépendent directement de ce cadre européen, tandis que les banques plus petites restent sous la tutelle d’une autorité nationale.