La reconversion, parent pauvre des politiques d…
C’est dans un contexte économique de taux bas, de tensions commerciales au niveau mondial et du retrait du Royaume-Uni de l’Union Européenne (Brexit) que l’Autorité Bancaire Européenne a ouvert le 31 janvier dernier son 5ème traditionnel exercice de « Stress Test ».
Mis en place post-crise de 2008, cet outil de supervision bancaire permet au régulateur européen d’évaluer la résilience du système financier de la zone Euro en cas de survenance de chocs systémiques macroéconomiques pour lesquels l’UE est exposée. Au niveau européen, la réalisation de cet exercice fait intervenir plusieurs acteurs : d’une part la Commission Européenne et l’ESRB qui construisent les scénarios de stress macroéconomiques, d’autre part l’Autorité Bancaire Européenne qui coordonne la réalisation de l’exercice jusqu’à la publication des résultats.
L’approche de l’exercice de « Stress Test » est relativement simple. Les banques doivent projeter sur un horizon de 3 ans l’impact d’une dégradation macroéconomique majeure sur leurs bilans, selon un scénario de base et un scénario adverse (dit défavorable). Les impacts sont ainsi restitués sur les ratios de solvabilité, les ratios de liquidité ainsi que le niveau de rentabilité.
L’exercice 2020 porte sur un échantillon de 51 banques européennes dont la taille du bilan est supérieure à € 30 Mds. Ce périmètre couvre ainsi plus de 70% des actifs bancaires de l’UE.
A noter que le lancement de l’exercice de Stress Test est concomitant avec la formalisation du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne : le Brexit. En effet, depuis le 31 Janvier 2020, le Royaume-Uni est officiellement sorti de l’UE. Christine Lagarde, présidente de la BCE, a déclaré à ce propos : « C’est avec un grand regret que nous voyons nos amis britanniques quitter l’Union européenne. Cet accord ouvrira cependant la voie à un départ ordonné et moins perturbateur ».
Cependant, des incertitudes demeurent concernant la situation post-Brexit, d’autant que les négociations entre le Royaume-Uni et l’UE concernant leurs relations futures commencent à peine. La question qui se pose d’ores et déjà concerne les effets du Brexit sur l’économie réelle.
L’exercice de « Stress Test EBA 2020 » apparait de ce fait opportun pour les superviseurs européens car il permettra d’évaluer la résilience du système financier européen compte tenu des perturbations économiques à venir liées au Brexit.
Le scénario adverse défini par le superviseur européen dans le cadre de cet exercice 2020 traduit notamment les effets collatéraux anticipés liés au Brexit. Dans ce scénario somme toute sévère, on constate une baisse cumulée du PIB de l’UE de l’ordre de 4.3%, une augmentation du chômage de 3.5 points et un effondrement des valeurs boursières de l’ordre de 25% dans les pays développés et de près de 40% dans les pays émergents.
De plus, on note un mouvement baissier de 16% des prix de l’immobilier résidentiel et de 20% en ce qui concerne l’immobilier commercial. Dans ce contexte de crise, la période prolongée de taux d’intérêt bas entraine une baisse de confiance (modélisée par des anticipations pessimistes de la croissance nominale et de la demande) qui serait amplifiée par des tensions commerciales au niveau mondial.
De même, ce ralentissement de la croissance couplé à l’augmentation des primes de risque conduit à une remise en question de la soutenabilité de la dette du secteur public et privé au sein de l’UE.
Avec des situation bilantielles déjà sous pression du fait notamment de l’environnement de taux bas, le défi clé des banques dans le cadre des « Stress Test 2020 » sera de rassurer la place financière sur leur capacité à absorber de façon durable les effets collatéraux liés au Brexit.
Depuis le référendum de sortie du Royaume-Uni de la zone euro, le secteur financier européen a commencé à prendre un certain nombre de mesures visant à anticiper les impacts du divorce avec nos voisins britanniques. Peut-on dire à l’heure de la séparation que ces mesures ont été suffisantes ? Une grille d’analyse pourra être construite notamment grâce aux résultats des « Stress Test EBA 2020 ».
Les résultats de cet exercice de Stress Test seront publiés le 31 juillet 2020 et serviront à alimenter le processus d’évaluation et de surveillance prudentielle des instances de régulations européennes (SREP).