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TURPE 7 : Défis et perspectives pour le réseau électrique français

Le futur TURPE 7 apportera plusieurs changements importants : hausse des tarifs, essor des flexibilités, soutien à l’autoconsommation, résilience climatique... Sia Partners décrypte les enjeux pour les consommateurs, les fournisseurs et les gestionnaires de réseau d’électricité en France.

Le TURPE : Mécanisme de financement et de régulation des réseaux électriques

Le Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricité (TURPE) est un dispositif clé qui régule le financement de l’entretien, du développement et de la modernisation des réseaux de transport et de distribution d’électricité en France. Établi par la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE), le TURPE est un barème réglementé révisé tous les quatre ans, et ajusté annuellement pour tenir compte de l’inflation et des coûts supportés par les gestionnaires de réseau, notamment Enedis et RTE.

Tous les utilisateurs, qu'ils soient particuliers ou professionnels, contribuent au financement des réseaux en s'acquittant du TURPE.

 

Quatre principes sont au cœur de sa définition :

  • Le timbre-poste : Le tarif est identique, peu importe la distance entre le site d’injection et le site de soutirage.
  • La péréquation tarifaire : Le tarif est uniformisé sur l’ensemble du territoire national.
  • La non-discrimination : Les coûts sont appliqués de manière équitable selon les catégories d’utilisateurs, indépendamment de leur usage final de l’électricité.
  • L’horosaisonnalité : Les tarifs varient selon les heures et les jours, encourageant ainsi une consommation responsable durant les périodes de forte demande.

Le TURPE se base également sur trois composantes financières principales :

  • Une composante annuelle de gestion : Elle couvre les coûts de gestion des dossiers, l’accueil et la facturation supportés par les gestionnaires de réseau.
  • Une composante annuelle de comptage : Elle couvre les coûts liés à l’installation et l’entretien des compteurs électrique.
  • Une composante annuelle de soutirage : Elle varie en fonction du profil du consommateur, de la formule tarifaire choisie et de la puissance souscrite. Elle reflète les couts réseau générés par l’utilisateur.

Le TURPE 6 est en vigueur depuis le 1er août 2021 et restera applicable jusqu’au 1er février 2025. Dans le cadre de la préparation du futur TURPE 7, une consultation publique a eu lieu entre octobre et novembre 2024. Le nouveau tarif sera présenté d'ici janvier 2025 et entrera exceptionnellement en vigueur le 1er février 2025, au lieu du traditionnel 1er août. Le TURPE 7 régira la période 2025-2028, pour une durée totale de quatre ans et demi. Sa mise-à-jour aura lieu tous les ans à partir du 1er août 2026.

Répondre à des enjeux financiers et d’équité

  1. Augmenter le montant du TURPE

Pour que les gestionnaires de réseaux puissent mener à bien leurs missions dans les meilleures conditions possibles, une augmentation du TURPE d’environ 10 % est envisagée en 2025. Cette hausse sera suivie de trois années de révisions basées sur l’inflation.

Il est important de noter que le TURPE représente déjà entre 20 % et 30 % de la facture d’électricité des consommateurs. Cette augmentation pourrait donc avoir un impact significatif sur le budget des ménages et des entreprises. C’est pour éviter un effet yoyo auprès des ménages que la mise en place du TURPE 7 a d’ailleurs été avancée. En effet, la baisse des prix de l’énergie sur le marché de gros entrainera une baisse de la facture énergétique des ménages à partir du 1er février 2025. Pour éviter que cette baisse soit suivie d’une hausse en août, les deux calendriers ont été coordonnés.

  1. Pénaliser les ménages ayant choisi de ne pas s’équiper en compteur communicant

Environ 2,1 millions d'utilisateurs sont encore équipés de compteurs d’anciennes générations, engendrant des coûts additionnels liés aux relevés manuels et à la gestion des données. La CRE prévoit d’intégrer ces coûts dans le calcul d’un terme tarifaire spécifique du TURPE 7, qui sera appliqué aux utilisateurs concernés.

À compter du 1er février 2025, les consommateurs ayant fait le choix de ne pas s’équiper d’un compteur Linky devront s’acquitter d’un terme tarifaire spécifique, sauf en cas d’impossibilité technique imputable aux distributeurs. Ce montant est estimé à 6,93 €, facturé tous les deux mois. À cela s’ajoute un supplément de 4,18 €, également facturé tous les deux mois, pour les consommateurs qui ne transmettraient pas leur index ou qui ne prendraient pas rendez-vous pour un relevé. Ces mesures visent à encourager les derniers consommateurs réticents à s’équiper de compteurs intelligents ou a minima à communiquer leur consommation aux distributeurs.

Répondre aux nouveaux besoins des réseaux électriques

  1. Adapter les infrastructures du réseau aux conséquences physiques du changement climatique

Les aléas climatiques, de plus en plus fréquents et violents, impactent fortement le réseau électrique français. Les tempêtes, les vagues de chaleur et les incendies affectent particulièrement le réseau de distribution, constitué d’infrastructures souvent plus vulnérables et difficiles d’accès, comme les poteaux en bois, les boîtes de jonction et les postes de transformation. Les inondations représentent également un risque majeur, touchant les postes électriques et les câbles souterrains des distributeurs, tels qu’Enedis et les Entreprises Locales de Distribution.

Cette nouvelle donne climatique engendre des coûts supplémentaires pour les gestionnaires des réseaux. Ils doivent non seulement investir davantage dans le renforcement des réseaux pour les rendre moins vulnérables, mais également réparer les dégâts causés par les catastrophes naturelles. Par ailleurs, des investissements sont nécessaires pour le suivi, l’anticipation et l’intervention d’urgence face aux aléas climatiques et à leurs impacts.

Enedis, qui gère 95 % du réseau de distribution en France, investit environ 1 milliard d’euros par an dans la résilience de son réseau. Ces investissements devront augmenter progressivement pour faire face à l’intensification des conséquences du changement climatique.

  1. Accompagner le déploiement de la flexibilité afin de synchroniser production et consommation

Avec l’électrification croissante des usages et l’intégration toujours plus importante des énergies renouvelables, la flexibilité des réseaux électriques devient un enjeu majeur pour les gestionnaires de réseaux. La CRE perçoit le développement de la flexibilité comme une opportunité d’optimiser les coûts d’exploitation, de bénéficier d’une électricité à moindre coût et d’éviter le maintien ou le raccordement de capacités de production supplémentaires, potentiellement carbonées.

Le TURPE 7 a pour objectif d’encourager des initiatives de flexibilité afin de mieux gérer la demande, en particulier pendant les pics de consommation. Les flexibilités structurelles et régulières visent à inciter les consommateurs à décaler leurs usages grâce à un signal tarifaire, tel que le dispositif Heures Pleines / Heures Creuses (HP/HC). Pour être pleinement efficace, un alignement entre le signal tarifaire du fournisseur et les coûts d’acheminement est essentiel.

Ainsi le TURPE 7 ambitionne de promouvoir la flexibilité de manière structurelle en proposant de nouvelles plages d’heures creuses adaptées aux besoins du réseau, notamment :

  • En intégrant une différenciation des heures creuses entre l’été et l’hiver ;
  • En favorisant des plages d’heures creuses alignées avec l’abondance de l’énergie solaire en été. Pour ce faire, la CRE envisage d’allonger les heures creuses de deux heures l’après-midi. Ainsi, le nombre d’heures creuses serait porté de 8 à 10 heures pendant la période estivale ;
  • En excluant certaines plages d’heures creuses susceptibles de contraindre l’équilibre offre-demande à court terme.

La CRE recommande également de tenir compte de la diversité des caractéristiques locales des réseaux dans la définition des heures creuses, pour éviter de créer des pics de consommation significatifs dans des zones faiblement pourvues en panneaux photovoltaïques.

  1.  Augmenter les raccordements pour faire face aux nouveaux modèles de production et à l’électrification des usages

L'essor des énergies renouvelables décentralisées et l'expansion des infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE) accroissent le besoin de développement de nouvelles infrastructures de raccordement. En parallèle, l'électrification des processus industriels et la production d'hydrogène vert viennent s'ajouter à cette dynamique. La CRE anticipe donc une croissance des demandes de raccordement de 6 % par an durant la période du TURPE 7.

Dans ce contexte, la CRE prévoit d’instaurer une régulation incitative pour encourager RTE et Enedis à augmenter le nombre de raccordements tout en réduisant les délais. Par exemple, pour les projets jugés prioritaires issus des Schémas Régionaux de Raccordement aux Réseaux des Energies Renouvelables (S3REnR), la CRE envisage de mettre en place un système de bonus/malus asymétrique, fixé à 10k euros par MW d’écart à la trajectoire prévisionnelle de raccordement des postes sources, avec un plafond de 10 millions d’euros par an, pour chaque opérateur.

Toutefois, sur certains segments, comme le raccordement des IRVE dans le résidentiel collectif, la CRE considère qu’il n’est pas nécessaire que le TURPE 7 prévoie des régulations incitatives supplémentaires sur les délais de raccordement.  

  1. S’adapter au développement de l’autoconsommation
  • Développement de l’autoconsommation individuelle

Même si aujourd’hui les coûts de gestion sont supérieurs aux recettes pour Enedis, la CRE estime que les coûts supportés actuellement par Enedis pour la gestion des autoconsommateurs individuels ne reflètent pas les coûts futurs. L'augmentation du nombre d’autoconsommateurs va amener à la rationalisation du traitement de ces clients, ce qui pourrait réduire le coût unitaire de gestion. Ainsi, la CRE juge que des incitations supplémentaires ne sont pas nécessaires et envisage de maintenir le niveau actuel de la composante annuelle de gestion spécifique pour les autoconsommateurs individuels.

  • Développement de l’autoconsommation collective

Concernant l’autoconsommation collective, à la suite d’une modification de l’article L. 315-2 du Code de l’énergie en 2021, il est désormais possible que les points de soutirage et d'injection soient situés sur le réseau public de distribution d'électricité, à condition que l'électricité fournie soit d'origine renouvelable. Pour garantir la cohérence avec cette évolution, la CRE prévoit d'étendre la composante annuelle de gestion spécifique à l’autoconsommation collective aux sites raccordés en HTA (Haute Tension A), en appliquant les mêmes modalités que pour les sites en BT (Basse Tension). Cela signifie que la composante annuelle de gestion spécifique à l’autoconsommation collective serait appliquée à l’ensemble des typologies d’opération d’autoconsommation collective, y compris les opérations dites « étendues ».

  1. Intégrer le développement du stockage par batteries

Le développement des capacités de stockage, en particulier par batterie, est en plein essor, et impacte autant le réseau de transport que le réseau de distribution. Elles jouent un rôle important sur le système, étant à la fois une contrainte en termes de raccordement mais également une opportunité grâce au potentiel de flexibilités apportés au réseau. La CRE envisage d’adapter la structure tarifaire pour favoriser l’optimisation de l’utilisation des capacités de stockage. Cela consiste à inciter à injecter de l’électricité lors des pointes de consommation locales et, inversement, encourager à ne pas injecter, voire à soutirer, lors des pointes d’injection locales.

Cette modification serait disponible de manière transitoire durant la période du TURPE 7, seulement à partir du 1er août 2026, pour les installations situées dans les zones de réseau où des contraintes locales sont les plus prévisibles. Elle serait également optionnelle pour les acteurs éligibles et remplacerait la composante de soutirage pour les utilisateurs qui choisissent d’y souscrire. La CRE prévoit ensuite une généralisation à l’ensemble du territoire sur la période du TURPE 8.

  1. Poursuivre l’amélioration de la qualité de données

Les gestionnaires de réseaux ne sont plus seulement des opérateurs techniques, mais également des opérateurs de données. Ils sont responsables de la collecte et de la mise à disposition des données énergétiques, comme les courbes de charge, les index d’énergie ou les puissances maximales, pour une variété d’acteurs : fournisseurs d’énergie, fournisseurs de services spécialisés, collectivités locales, entreprises et ménages.

Pour la période TURPE 7, la CRE envisage plusieurs évolutions pour stabiliser les bonnes performances atteintes par Enedis sur la qualité des données remontées par les compteurs communicants Linky. Elle réfléchit notamment à réhausser certains indicateurs existants et à en introduire de nouveaux portant sur la complétude des courbes de charge collectées et transmises par les compteurs communicants et sur les taux de publication des données aux différents acteurs.

Cette démarche est d'autant plus stratégique que la qualité des données constitue un facteur déterminant pour le développement de nouveaux modèles énergétiques, reposant sur la flexibilité et les services énergétiques intelligents.

Sia Partners : L’expertise au service des nouveaux enjeux énergétiques

  1. Accompagner les acteurs impactés par les évolutions du TURPE 7

La réforme du TURPE et l'évolution des infrastructures énergétiques auront des répercussions importantes sur divers acteurs du secteur, notamment

  • Les consommateurs, entreprises et les collectivités, qui devront continuer à faire face à des factures d'électricité élevées, avec un risque d'augmentation supplémentaire.
  • Les gestionnaires de réseaux, RTE, Enedis ainsi que les ELD, qui auront l’obligation de s'adapter aux nouvelles exigences en matière de raccordement et de flexibilité.
  • Les producteurs d'énergie renouvelable qui auront des opportunités pour ajuster leurs pratiques en fonction des nouveaux modèles de tarification et de stockage.
  • Les fournisseurs d’énergie et de services énergétiques, qui pourront adapter ou développer de nouvelles offres pour tirer avantage des nouveaux modèles de tarification.

Chez Sia Partners nous travaillons depuis plus de 20 ans sur les enjeux du secteur de l’énergie en France et accompagnons au quotidien les grands chantiers de l’ensemble des acteurs de la transition énergétique : producteurs d’énergie, gestionnaires de réseau, fournisseurs d’énergie et de services, acteurs de la mobilité électrique, industriels, etc.

Cette expérience nous permet de vous accompagner dans la prise en compte des évolutions réglementaires et d’identifier les opportunités liées aux transformations du secteur énergétique.

  1. Bénéficier de notre expertise sur plusieurs sujets clés

Sia Partners dispose d’une expertise complète sur plusieurs thématiques en lien avec les évolutions prévues sur le TURPE 7 :

  • La flexibilité de la consommation et de la production électrique, nécessaire pour accompagner l’électrification des usages.
  • La reconstitution des flux d’énergie, processus réglementaire qui concerne les gestionnaires de réseau de transport et de distribution, RTE et Enedis, et les fournisseurs d’énergie, pour répondre au besoin d’équilibrage entre la production (les injections) et la consommation (le soutirage) d’énergie.
  • L’autoconsommation collective, l’une des cartes à jouer pour le développement des énergies renouvelables en France.
  • Les infrastructures de recharge pour les véhicules électriques (IRVE), et les enjeux associés à leur déploiement.
  • La tarification dynamique, imposée aux fournisseurs d’électricité par l’Union Européenne depuis 2021.
  • Le stockage stationnaire, les différentes technologies de batteries et les matériaux associés, ainsi que les tendances du marché actuel.

Prochainement, Sia Partners lancera une étude complète sur les impacts de l’évolution du TURPE, fournissant des insights précieux pour tous les acteurs du secteur.

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