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Nous revenons pour vous sur 3 ans d’ajustement progressif des instances représentatives du personnel et sur les modalités d’accompagnement de ce changement majeur dans l’organisation du dialogue social en France.
Depuis le 1er janvier 2020, le Comité Social et Economique, remplace la trilogie d’instances qu’étaient le CE, le CHSCT et les DP. Le but d’une telle évolution pour le gouvernement ? Simplifier et fluidifier le dialogue social. En ce début d’année 2022, la plupart des élus atteignent leur mi-mandat. Que retenir de cette transformation et de ses impacts sur le dialogue social en entreprise ? Qu’en pensent les élus, les entreprises ?
Il est déjà temps de dresser un premier bilan ! La refonte des instances du personnel apparaissait depuis plusieurs années comme une nécessité, face à un embouteillage des occurrences et des élus mandatés qui ne pouvaient pas bénéficier d’une vue à 360° sur les différents sujets. Si l’utilité d’une réforme en tant que telle était nécessaire, la mise en œuvre et l’application de cette transformation s’est révélée plus complexe…
La 16 décembre dernier a été publié le rapport sur l’évaluation des ordonnances dites « Macron » mettant en place le CSE dans les entreprises françaises, co-dirigé par Jean-François Pilliard, ancien responsable du patronat de la métallurgie, et Marcel Grignard, ex-numéro deux de la CFDT. Celui-ci dresse un état des lieux en dent de scie. S’il souligne la « mise en place largement effective des réformes portées par les ordonnances, en nombre d’instances créées et en pourcentage des entreprises et salariés couverts », il pointe cependant du doigt l’« adaptation très progressive, et parfois difficile, des partenaires sociaux au nouveau cadre légal. » Il souligne enfin le « besoin d’accompagnement et de formation des acteurs » lié à la « diversité des compétences attribuées au CSE ». Alors, de quels impacts parle-t-on ?
L’un des grands objectifs de la réforme, c’est « la simplification du mille-feuille des instances représentatives » comme le rappelle l’économiste Thomas Breda. Un enjeu de « rationalisation » souligné par le rapport d’évaluation qui note une moindre fréquence des réunions et la fin du traitement des mêmes sujets dans des instances différentes, mais qui remarque cependant un « allongement des réunions et des ordres du jour pour pouvoir traiter l’ensemble des sujets ». Cet embouteillage est regretté par certains DRH : celui de Sodexo partage qu’il a prévu « des réunions de trois jours tous les mois ». Et rares sont les CSE de moins d’une journée pour Didier Jauliac, DRH de SFR Business !
Principal risque pointé du doigt par le rapport vis-à-vis de cette évolution, la surcharge de travail de représentation qui peut déboucher sur une « fragilisation de l’engagement des élus ». Cela est également dû au fait que les élus suppléants n’assistent plus aux réunions et sont ainsi « moins bien associés au suivi des sujets », complexifiant leur préparation éventuelle à des mandats futurs. Une transition difficile à gérer…
Si parfois la transition peut être aisée, la suppression du CHSCT en tant que tel et surtout celle des délégués du personnel a pu et continue à constituer une difficulté pour les élus et pour les directions. Les entreprises de plus de 300 salariés ont dû mettre en place des CSSCT afin de pouvoir traiter des questions d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail, constitués d’élus du CSE. A la fin de l’année 2019, 74% des entreprises concernées disposait d’une CSSCT. Cette double casquette pour les élus peut s’avérer difficile à porter, en comparaison avec la spécialisation précédente qu’apportait l’instance dédiée (CHSCT). Leur en demande-t-on trop ?
En effet, le rapport d’évaluation pointe du doigt que « sur les questions de santé, sécurité et condition de travail, le traitement de ces sujets n’est pas encore stabilisé et la nouvelle articulation entre CSSCT et CSE reste difficile à trouver ». Les élus regrettent la charge de travail exponentielle qui leur est demandée, face à une « technicisation » de leur rôle. Si la réforme a bien rempli son rôle en donnant aux élus une vision « de bout en bout » des problématiques, elle a pour corollaire une complexification du rôle de l’élu et un alourdissement de sa tâche. « Traiter tous les sujets …. et donc moins bien » ! Sur ce point, Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, regrette « un appauvrissement du dialogue social »…
Le rapport d’évaluation souligne de nouveau sur ce point le fort besoin d’accompagnement des acteurs du dialogue social face à leur nouveau rôle et la nécessité de renforcer leur expertise, afin de contrer au maximum le désengagement visible des salariés mandatés. Des solutions sont à trouver !
La disparition des délégués du personnel quant à elle est une réelle source d’inquiétude à la fois côté direction et côté représentants des salariés. Cependant, cette évolution a pu être palliée par la mise en place de représentants de proximité, sous réserve de négociation d’un accord collectif, la loi ne prévoyant pas de dispositions spécifiques à ce mandat contrairement à ce qui existait pour les Délégués du Personnel. Selon une étude du comité du rapport d’évaluation des ordonnances, 25% des accords de CSE prévoient la désignation de représentants de proximité. Force est de constater que la remontée d’information du terrain est moins fluide et plus complexe à obtenir, faute de cadre défini. Les managers ont à ce titre un rôle clé, pour lequel ils ne sont pas toujours bien préparés ! Ceux-ci doivent maintenant se saisir des enjeux relatifs au dialogue social, comme l’indique le DRH de SFR Business : « On a une dizaine d’établissements avec des représentants de proximité. Localement, ils sont nos capteurs pour les droits d’alerte ». Si l’introduction de ces nouveaux représentants est une chance à la fois pour l’employeur et pour les salariés, « il y a un effort de pédagogie à faire » comme le souligne le DRH de Cointreau.
Le CSE connait vraisemblablement une mise en place contrastée à la fois du côté des élus et de la direction. Si les élus regrettent la diminution de leurs moyens (nombre de siège, nombre d’heures de délégation, nombre d’instances récurrentes) et la complexification de leur rôle, l’intérêt du CSE est reconnu comme permettant aux représentants du personnel de disposer d’une vision complète, à 360 degrés, des projets présentés par la Direction.
Côté Direction, malgré la simplification certaine de l’architecture du dialogue social, on peut cependant regretter des ordres du jour extrêmement chargés, et la difficulté d’accompagner les managers dans le dialogue avec les représentants de proximité.
Evolution nécessaire, la mise en place du CSE demande néanmoins aux entreprises une forte capacité d’adaptation et d’accompagnement de ses élus et de son management afin d’atteindre le but recherché, celui d’un dialogue social fluide et au service des intérêts globaux de l’organisation.
L’ensemble des acteurs du dialogue social en entreprise ont vu leurs rôles et activités impactés par la fusion des instances. Les élus et les DRH en première ligne sont amenés à changer leur manière d’appréhender les relations sociales : il s’agit d’une vraie rupture. Les élus doivent à la fois revoir leur mode d’organisation interne afin de s’adapter à la charge de travail et à la complexité de leur nouveau rôle. Ils doivent se former sur les compétences et expertises dont ils ne disposaient pas jusqu’à présent et en particulier, celles des CSSCT. Côté DRH, il faut à la fois accompagner les élus dans ce changement très structurant, réel enjeu pour la qualité du dialogue social, mais aussi être au plus près des équipes en charge des relations sociales, notamment pour optimiser l’organisation et la fluidité des échanges avec les partenaires sociaux.
Si ces professionnels du dialogue social s’adaptent progressivement (non sans difficulté), les managers, eux, sont parfois délaissés face à leurs nouvelles prérogatives de relai du dialogue de proximité… Quel est leur rôle ? Quelles postures doivent-ils adopter ? Quel sens donner à ce dialogue au plus près du terrain ? Pour quelle efficacité attendue dans cette nouvelle architecture de représentation du personnel ? Le chemin est encore long et il faut à l’évidence, continuer à réinventer ce dialogue social de proximité.
Sia Partners accompagne la professionnalisation du dialogue social en entreprise et notamment, RH et managers dans la rénovation du dialogue de proximité et le développement de la performance sociale. Nous le voyons concrètement, le renouvellement de l’architecture des instances a perturbé la qualité des relations sociales à grande échelle. Nous sommes convaincus que le dialogue de proximité est un atout majeur pour la performance sociale et économique de l’entreprise ; c’est un capteur de terrain indispensable, qui permet notamment de prévenir les risques psycho-sociaux. Les entreprises se doivent d’accompagner leurs managers dans leurs nouvelles responsabilités pour répondre à ces différents enjeux pour :
La réinvention des instances représentatives du personnel ayant chamboulé les relations sociales, ces défis sont à relever rapidement pour les entreprises françaises afin de faire revivre le dialogue entre employeur et salarié, enjeu au service de la performance économique et sociale des organisations.