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Au travers de la loi Pacte à paraître en janvier 2019, l’intention du Gouvernement consistant à faire de la France le fer de lance des crypto-actifs dans le monde s’ancrera bientôt dans une réalité tangible et prometteuse.
En Juillet 2018, nous avions publié un article résumant les grands principes directeurs du Rapport Landau.
Quelques mois après la remise de ce rapport aux députés, c’est au tour de la loi Pacte d’être projetée sur le devant de la scène des crypto-monnaies en France. Le rapport Landau ayant servi de support de réflexion aux députés, qui ont par la suite proposé les amendements, le contenu de la loi Pacte ne devrait donc pas être très éloigné des préconisations du groupe de travail.
À date, la loi Pacte est encore en navette parlementaire au Sénat. Elle n’est pas encore votée définitivement, néanmoins les amendements concernant les crypto-monnaies ne semblent pas être la raison principale de cette navette parlementaire. Seul le choix du prestataire au sujet du droit au compte (évoqué dans la suite du texte) prête encore à débat.
Nous allons donc passer en revue les réformes qui ont été adoptées jusqu’ici et celles qui ont été seulement discutées, puis nous évoquerons les implications sur les crypto-actifs de la loi Fiscale à venir.
Il s’agit de la mesure principale concernant les crypto-actifs de la loi Pacte. Un cadre juridique vient encadrer les émissions de jetons numériques (article 26[1]). Dans le cadre des financements par émission de tokens (ICO), l’AMF aura la responsabilité d’attribuer un visa optionnel aux porteurs de projet « légitimes » respectant certains critères. Concrètement, les porteurs de projet devront remettre un document d’information à l’AMF. Ce document devra être composé d’un « contenu exact, clair et non trompeur et qui permette de comprendre les risques afférents à l’offre ».
Le principe de cet agrément est d’offrir aux porteurs de projet une certaine légitimité, notamment en opposition aux porteurs de projet qui ne l’auront pas obtenu. De fait, les investisseurs seront plus enclins à soutenir une ICO ayant obtenu ce label, ce qui conduit à élargir le cercle des investisseurs potentiels et donc à rendre la France plus attractive pour le marché des ICOs et des crypto-actifs en général.
Cette fois par le biais d’un amendement présenté par les députés LREM, les porteurs de projet se voient attribuer une reconfirmation du droit au compte - qui existait déjà dans la loi - spécialement pour les ICOs.
L’amendement stipule : « Les établissements de crédit mettent en place des règles objectives, non discriminatoires et proportionnées pour régir l'accès des émetteurs de jetons ayant obtenu le visa mentionné à l'article L. 552‑4 du présent code aux services de comptes de dépôt et de paiement qu'ils tiennent. Cet accès est suffisamment étendu pour permettre à ces personnes de recourir à ces services de manière efficace et sans entraves ».
Concrètement, les porteurs de projet ayant reçu le label AMF et qui n’auraient pas pu ouvrir un compte bancaire pourront faire appel à la Caisse des Dépôts et des Consignations (CDC). Ceci est une évolution très positive puisqu’il était jusqu’à lors impossible pour une société française ayant des activités relatives aux crypto-actifs d’ouvrir un compte en Banque, les institutions bancaires privilégiant la prudence en refusant toute ouverture de nouveau compte. A noter que ce choix de la CDC n’est pas encore définitif, il fera l’objet de discussions lors de la navette parlementaire.
Il a été décidé que l’AMF pourrait devenir le guichet unique pour les prestataires de services relatifs aux crypto-actifs (et non pas uniquement des porteurs de projet d’ICOs) qui souhaiteraient solliciter l’agrément optionnel. L’AMF serait donc le seul acteur à pouvoir délivrer un agrément spécifique aux prestataires de services concernés, c’est-à-dire par exemple aux sociétés de conseil en investissement, ou aux intermédiaires de ventes de crypto-actifs[2].
D’autres amendements ont été discutés en séance, sans succès :
La prochaine grande étape pour la France dans l’adoption des crypto-actifs est la mise en place d’un cadre fiscal adapté, notamment par rapport aux nouvelles directives issues de la loi Pacte. Voici une liste des mesures qui seront potentiellement adoptées d’ici Janvier 2019 :
Echange crypto/crypto : « Neutraliser » les échanges entre cryptos en les considérant comme « des opérations intercalaires » non imposables et ne conserver comme fait générateur de l’impôt que le « cash out », c’est-à-dire la conversion en monnaie légale ou tout autre forme de bien ou de service.
Flat Tax : Adoption de la Flat Tax (taux unique de 30% d’impôts) pour les gains issus de crypto-actifs chez les particuliers. Dans le cas où le particulier ne serait pas en capacité de prouver son prix d’acquisition, c’est le régime des métaux précieux (au forfait) qui serait exercé (11,5% pour l’or). Auparavant déclarable sous la forme de BNC ou BIC dans la loi (pas de cadre clair néanmoins, et une décision du Conseil d’Etat qui propose une solution différente (19%+CSG)).
ICOs : Précédemment comptabilisé comme du chiffre d’affaires et donc soumis à la TVA ainsi qu’à l’IS (60% au total), le produit des tokens (c’est-à-dire le montant levé par ICO) sera traité comme un produit constaté d’avance. Il sera fiscalisé de manière décalée (un paiement de la TVA est donc probablement à prévoir…).
Le paysage de la Blockchain et des crypto-actifs évolue en France. Le Gouvernement a l’intention de faire de la France une terre d’accueil des financements par ICO, et plus généralement des projets relatifs aux crypto-actifs. Il y a donc fort à parier que de nouvelles mesures verront le jour dans les prochains mois et les prochaines années.
Rendez-vous en janvier 2019 pour la suite …
[1] Assemblée Nationale - Projet de loi
[2] Notons tout de même un point de détail : Certains services relèveraient uniquement de l’AMF, alors que d’autres impliqueraient l’avis de l’Autorité Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR), notamment concernant la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.