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Les banques ne vont plus pouvoir centraliser l’intégralité de leurs encours de Livret A auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC).
Un décret en ce sens est paru au journal officiel en février dernier[1] (mise en application en avril 2018), ce qui pourrait avoir un impact non négligeable sur les banques françaises qui avaient opté pour cette option de « surcentralisation ».
Le décret du 2 février 2018 revoit les règles de centralisation des dépôts collectés au titre du Livret A et du livret de développement durable et solidaire (LDDS) qui, depuis le 1er juillet 2016, permettaient aux banques qui le souhaitaient de centraliser l’intégralité desdits dépôts.
Avec la mise en place de ce nouveau décret, et suite à une demande de la CDC qui cherchait à se prémunir contre une éventuelle hausse des dépôts centralisés, le Livret A constituant une ressource coûteuse, il ne sera plus possible pour les banques de déposer l’intégralité des sommes collectées au titre du Livret A et du LDDS. Les établissements concernés se verront donc restituer les sommes centralisées auprès de la CDC au-delà du seuil fixé par voie réglementaire qui est de 60% environ. Il est prévu que cette restitution s’étale sur une période de 10 ans : chaque année, et à compter du 1er avril 2018, un dixième des sommes « surcentralisées » sera reversé aux banques concernées. Pour les banques qui le souhaitent et qui en ont fait la demande entre le 1er janvier 2018 et le 28 février 2018, une procédure de restitution accélérée est prévue : les sommes surcentralisées seront restituées par tiers sur une période de 3 ans – entre le 1er avril 2018 et le 1er avril 2020. Par ailleurs, les établissements qui auraient opté pour une centralisation intégrale des dépôts collectés au titre du Livret A et du LDDS après le 13 octobre 2017 se sont vu restituer la totalité des sommes concernées à compter du 1er avril 2018. Ainsi, à terme, l’ensemble des banques françaises seront tenues de conserver à leur bilan 40% des sommes collectées au titre du Livret A et du LDDS.
La restitution des encours surcentralisés n’est pas avantageuse pour les établissements financiers français, et en particulier pour ceux ayant opté pour la centralisation intégrale. En effet, le livret A et le LDDS coûtent cher, avec une rémunération à 0,75%, bien supérieure par exemple au taux actuel des bons du Trésor. L’option de « surcentralisation » assurait une rémunération des établissements à hauteur de 1,05% (taux de rémunération du Livret A + 0,3% de commissions de collecte) sur l’intégralité des sommes collectées (et centralisées).
Parmi les banques ayant opté pour la surcentralisation intégrale, on trouve notamment BNP Paribas, le LCL, Crédit du Nord et la Banque Postale (LBP). Cette dernière, distributrice historique du Livret A, sera particulièrement touchée par la fin de la centralisation intégrale. Au 31/12/2017, les encours collectés au titre du Livret A et du LDDS par LBP, centralisés auprès de la CDC, s’élèvent à près de 68 mds€. Avec un taux de centralisation à 60%, ceteris paribus, ce sont plus de 27 mds€ qui devraient lui être restitués. Le manque à gagner sur les commissions versées par la CDC (0,3%) s’élève, ceteris paribus, à plus de 8 millions d’euros par an, sur 10 ans. S’ajoute à cela le coût éventuel lié au différentiel entre la rémunération du Livret A et du LDDS (0,75%) et les taux de marché auxquels la banque peut espérer (actuellement) les replacer. Or, au cours des dernières années, le taux associé à une OAT 5 ans n’a pas dépassé 0,45%... Le Livret A et le LDDS s’avèrent donc être actuellement des ressources coûteuses pour les banques, en raison de leur rémunération bien supérieure aux taux des marchés monétaires. Rappelons ici que ce taux de rémunération est bloqué à 0,75% depuis le 1er août 2015, suite à une décision du gouverneur de la Banque de France, puis à celle du gouvernement au cours de l’été 2017 (gel du taux du Livret A à 0,75% jusqu’en 2020, l’objectif étant de revoir à cet horizon la formule de calcul) ; décision favorable à la fois pour les banques et la CDC, dans la mesure où la formule de calcul en vigueur en 2017 aboutirait à une rémunération supérieure à 1,5% en raison d’un taux d’inflation bien supérieur à l’EONIA.
Par ailleurs, autre point de difficulté potentiel pour les banques qui se verront restituer des encours : 75% des sommes reversées doivent être consacrées au financement de nouveaux prêts à l’attention des PME[2]. Toutefois, au regard de l’importance des sommes en jeu, aucune sanction ne devrait être appliquée.
Le prochain changement relatif au livret A, au-delà du taux de centralisation, devrait intervenir en 2020, avec la mise en place d’une nouvelle formule de calcul (simplifiée) de son taux de rémunération. Il sera égal à la moyenne semestrielle du taux d’inflation et des taux interbancaires à court terme (EONIA), avec un minimum fixé à 0,5% et un arrondi au dixième de point le plus proche. Cela devrait permettre de reconnecter davantage le coût de cette ressource avec les taux de marché, au dépend notamment de la couverture de l’inflation.
[1] JORF n°0036 du 13 février 2018
[2] Article L221-5