La reconversion, parent pauvre des politiques d…
Alors que la reprise en main de la distribution en direct est devenue un objectif majeur pour les hôtels afin de contrer le poids pris par les agences de voyage en ligne (OTA), Sia Partners vous propose d’analyser les solutions de 9 grands groupes hôteliers en France pour leur distribution mobile.
Alors que la reprise en main de la distribution en direct est devenue un objectif majeur pour les hôtels afin de contrer le poids pris par les agences de voyage en ligne (OTA), Sia Partners vous propose d’analyser les solutions mises en place par 9 grands groupes hôteliers en France pour leur distribution mobile.
Reprendre la main sur la distribution en ligne est devenu un enjeu important pour les acteurs hôteliers. Ce canal de distribution a rapidement fait le jeu des Online Travel Agencies (OTA) (comme Expedia ou Booking) qui sont parvenues à se positionner sur le marché avec des taux de commissions représentant une part importante des tarifs affichés (de l’ordre de 16% en France pour Booking.com). La capacité à distribuer en direct est devenue un levier d’optimisation prioritaire pour les grandes chaînes hôtelières, d’autant plus sur le canal mobile où la croissance est forte (+40% pour le marché du m-commerce en France en 2015). Sia Partners vous propose d’analyser les solutions mises en place par les grands groupes en France dans le cadre de leur distribution directe mobile.
Nous avons étudié les applications mobiles de 9 groupes hôteliers présents en France avec 37 enseignes et près de 5 500 hôtels sur le territoire français. Une grille qualitative et quantitative a été utilisée pour comparer les solutions proposées par ces différents groupes.
Notre analyse a porté sur les grands groupes hôteliers implantés en France. Nous avons limité notre panel aux groupes ayant au minimum 10 hôtels présents sur le territoire français, et un chiffre d’affaires mondial minimum de 10 millions d’euros.
Cette ségrégation nous a amené à un échantillon de 10 grands groupes hôteliers (voir figure ci-dessous).
Parmi ces 10 groupes, 9 possèdent des applications mobiles [1]. Notre panel se compose donc de 9 groupes hôteliers sur lesquels nous avons appliqué notre grille d’analyse.
Cette grille, composée d’élément quantitatifs (nombre d’étapes pour une réservation de chambre par exemple) et qualitatifs (éléments liés au design de l’application), nous a permis d’évaluer les différentes applications en fonction d’un ensemble de thèmes devant être couverts selon nous par une application mobile [2].
Notre analyse a tout d’abord porté sur l’existence même d’applications mobiles, et leur niveau dans la chaîne du groupe hôtelier. Trois niveaux peuvent être appréhendés : le niveau Groupe, le niveau Enseigne et le niveau Hôtel. L’analyse de l’existence d’application hôtelière sur ces trois niveaux a débouché sur plusieurs enseignements.
Le premier grand enseignement que nous avons tiré de notre observation est une centralisation très importante des applications mobiles autour des groupes hôteliers.
Ainsi, la totalité des groupes [3] que nous avons observés misent sur une application capable de distribuer au niveau groupe les produits des différentes sous-enseignes. Ce modèle s’impose comme une norme que l'on parle d'un groupe mettant en avant sa marque groupe (Best Western, Hilton, etc.) ou d’un groupe misant plutôt sur la renommée de ses enseignes (Louvre Hotels par exemple, dont la “marque groupe” est peu connue du grand public).
L’application Groupe couvre alors l’ensemble des zones géographiques où le groupe est implanté, ainsi que l’ensemble des enseignes, quelque que soit l’étendue de gamme proposée. Chez Louvre Hotels, par exemple, les enseignes « économiques » telles que Campanile ou Première classe côtoient donc les enseignes haut-de-gamme comme Golden Tulip.
Plus intéressant encore, il existe seulement 5 applications dédiées aux enseignes sur les 37 enseignes présentes dans les 9 grands groupes hôteliers étudiés. Ainsi, même dans des groupes où les marques sont des marques fortes comme les enseignes d’AccorHotels par exemple, le client est renvoyé vers une application groupe concentrant l’ensemble des enseignes.
Cette centralisation de la stratégie digitale représente donc pour nous une spécificité forte des groupes hôteliers.
Nous voyons plusieurs avantages derrière ce positionnement. Il permet tout d’abord de proposer aux clients un choix unique et clair, plutôt que de multiplier les applications. De plus, la mise en place d’une application groupe et la centralisation de sa gestion, permet de concentrer les efforts et coûts de développement sur une seule application. Enfin, récupérer le volume d’audience de l’ensemble des clients de la chaîne en un seul point d’entrée permet de gagner en visibilité et de simplifier l’analyse de data et le suivi en termes de business liés à l’application.
En revanche, cette stratégie limite la capacité à intégrer l’identité propre à chaque enseigne aux parcours de vente.
De façon moins systématique, des applications sont mises en place à des niveaux de granularité moindre au sein des chaînes hôtelières. Elles remplissent alors un rôle différent, essentiellement centré autour de services de conciergerie ou d’informations voyageurs. Les fonctionnalités de distribution sont alors simplement rendues disponibles par une redirection vers le canal de distribution web, adapté au mobile. On retrouve ainsi ce type d’application mobile dans 22 des 37 enseignes étudiées (parmi les 9 grands groupes hôteliers présents en France).
Prenons le cas de Mercure (groupe AccorHotels), qui n’a pas d’application mobile pour son enseigne, mais qui dispose de multiples applications locales, comme par exemple Mercure Edimbourg. Cette application renseigne les voyageurs sur la météo locale, sur la carte des bus et des métros, sur les vols à destination d'Edimbourg, etc... Il est même rendu possible de publier sur Facebook des cartes postales personnalisées, de connaître toutes les activités sportives et touristiques à proximité de l'hôtel, d’être conseillé sur un restaurant pour dîner et d’appeler le room service pour se faire servir son petit déjeuner.
Certaines applications locales poussent le concept encore plus loin en proposant notamment des services pour les professionnels. Holiday Inn Mauritius (groupe IHG) met ainsi à disposition des entreprises des salles de réunions et de conférences, et propose une liste d’activités team building en extérieur.
Ce type de fonctionnalité au niveau local répond donc à deux objectifs : le besoin de redonner une identité propre à chaque hôtel et la volonté de fournir une meilleure information aux voyageurs
Si les applications au niveau de l’hôtel se développent, elles restent minoritaires comparées aux applications groupes. En effet, une application mobile est coûteuse à développer et demande un engagement fort du client. La concentration des applications au niveau groupe permet d’avoir un budget suffisant pour miser sur deux leviers : un canal de vente efficace et rapide et des fonctionnalités innovantes qui permettront d’améliorer l’expérience client.
L’objectif premier de l’application mobile est d’offrir au client un canal de vente simplifié et efficace. En effet, notre benchmark confirme que les fonctionnalités disponibles sur les applications ont pour objectif de faire gagner du temps à leurs utilisateurs.
Les applications proposent toutes une fonctionnalité de réservation dès leur écran d’accueil Ce tunnel de réservation est soit intégré directement sur l’application soit accessible via une redirection vers un site web responsive - site web optimisé pour toutes formes de support - ordinateur, tablette, smartphone. Un des objectifs crucial pour les hôtels est de générer des ventes en direct. Il faut dès lors que ce tunnel de vente soit le plus rapide possible. La majorité des groupes cherchent à proposer un parcours client plus rapide que celui existant sur support web.
Avec en moyenne 4 étapes depuis la page d’accueil au choix de la chambre, le parcours de vente proposé est clair, simple et efficace. Cette rapidité du processus de réservation est complétée par certaines fonctionnalités qui permettent de gagner du temps. Ainsi l’option “ici ce soir” présente sur l’écran d’accueil de 64% des applications étudiées permet à l’utilisateur de trouver les chambres disponibles pour le soir même près de lui en se géolocalisant. Cette fonctionnalité lui permet donc de gagner du temps sur sa requête puisque qu’il n’a aucune donnée à renseigner (ville, date d’arrivée et date de départ).
De même, en offrant la possibilité au voyageur de consulter son historique de recherche (42 % des applications), l’application permet un gain de temps sur la réservation de chambre. Cette fonctionnalité permet au client sorti du tunnel d’achat de gagner du temps s’il souhaite retourner au processus de réservation d’une chambre.
Toutes ces fonctionnalités permettent aux hôteliers de réduire au maximum les étapes de réservation pour se concentrer sur ce qui ajoute de la valeur à l’expérience du client.
On constate cependant que les groupes hôteliers développent de plus en plus de fonctionnalités connexes allant au-delà de l’étape de réservation et apportant une nouvelle valeur ajoutée à l’application. Il s’agit désormais de s’appuyer sur l’application pour améliorer l’expérience client lors de son séjour et non seulement dans la phase de réservation. De plus, l’application est également un levier pour renforcer l’image de marque à travers la création d’un univers propre au groupe.
On note tout d’abord la présence d’un compte client dans 100% des applications testées lors du benchmark. A travers son compte client, le voyageur accède à des fonctionnalités supplémentaires. On retrouve par exemple les notifications la veille de l’arrivée dans la moitié des applications testées. Au-delà du canal de vente, c’est donc l’expérience client qui est améliorée par ce type de fonctionnalités.
De même, certains groupes hôteliers utilisent des fonctionnalités enfin d’améliorer leurs processus de check-in et de check out. Ainsi, la fonctionnalité de check-in à distance permet de faire gagner du temps au client tout en gardant la remise des clés comme moment privilégié pour rencontrer son client et donc se recentrer sur l’expérience client. Certains hôtels vont encore plus loin et suppriment le passage obligatoire par la réception. Ils proposent une e-clef sur le mobile du voyageur. Holiday Inn envoie par exemple une e-clef (un QR code) à son client, ce qui lui permet d’accéder directement à sa chambre sans passer par la réception. Le même principe peut être appliqué pour le check out : le voyageur réalise son check out en ligne en réglant l’ensemble de son séjour directement sur son mobile.
Afin de favoriser les interactions des clients avec les services de l’hôtel, de nombreuses applications offrent un service de conciergerie (ou plus précisément d’e-conciergerie). Best western a ainsi lancé son application d’e-conciergerie dès 2013. L’application offre de nombreuses fonctionnalités, notamment un chat pour permettre au client de communiquer directement avec l’équipe hôtelière.
Enfin, les applications Groupe utilisent ce canal pour proposer du brand content (contenu produit par la marque) aux voyageurs. L’application Marriott propose par exemple du contenu original qui provient directement de son magazine numérique « Traveler ». Ils créent ainsi une expérience immersive reflétant l’image de marque portée par le groupe.
L’ensemble de ces fonctionnalités améliore donc l’expérience d’achat du client, mais également son expérience de séjour dans l’hôtel. L’application devient un véritable outil stratégique au service de la satisfaction client. Nous sommes convaincus que ce dépassement de l’appréhension de l’application mobile comme simple canal de vente s'amplifiera dans les années à venir.
Notre conviction est que les grands groupes hôteliers doivent être capables d’adapter leur stratégie digitale, sur application mobile notamment, afin de contrer le pouvoir pris par les OTAs et Airbnb. Pour cela, deux leviers principaux s’offrent à eux : faire évoluer le modèle de distribution associé aux applications mobiles, mais également faire évoluer leur contenu.
Tout d’abord, l’activité de cross selling, qui consiste à proposer une vente complémentaire à la chambre lors de la réservation (petit-déjeuner, spa, restauration, etc...) est encore trop peu répandue. Actuellement, dans la majorité des applications mobiles, quelques propositions sont systématiquement faites au client lors de la réservation de sa chambre : on parle alors des must-have. Il s’agit par exemple du petit déjeuner (proposé dans 92% des applications observées) ou encore du sur-classement de la chambre (“l’upselling”, proposition qui est faite dans 82% des applications).
En dehors de ces propositions, il est encore rare de se voir proposer une place de parking, un early check-in ou un late check-out après la réservation de la chambre (propositions qui sont faites dans moins de 20% des applications étudiées). Certains services ne sont même jamais proposés sur ce canal de vente. Il s’agit notamment de tous les services de tiers, comme le transfert en taxi vers l’aéroport ou la location de voiture. Ce manque de services proposés lors de la réservation nous mène donc vers une conviction forte, celle du développement futur de l’offre cross-sell sur les applications, tout d’abord parce qu’elle permet de dégager des revenus additionnels non négligeables pour les hôtels et d’autre part, parce qu’elle répond au besoin actuel de la nouvelle génération d’avoir accès à un plus grand éventail de services.
AccorHotels, 6eme opérateur hôtelier au niveau mondial, pousse le concept un cran plus loin. Sur son application mobile de réservation, AccorHotels intègre - en plus de ses 10 enseignes - des hôtels indépendants sélectionnés selon leur emplacement et les notes des voyageurs sur TripAdvisor. L’objectif de cette démarche est double: d’une part, accroître la satisfaction client en lui proposant un choix plus riche et d’autre part, contrer la montée en puissance des OTA en se positionnant comme un canal de vente multi-marques.
Le canal de vente doit bien sûr subsister et être, comme nous l’avons vu plus haut, rapide, clair et efficace. Néanmoins, nous pensons que l’application doit aussi être capable de proposer une autre expérience à ses clients via la proposition de contenu d’une part, et en devenant un espace d’échange d’autre part.
Tout d’abord, la mise à disposition de contenu sur l’application mobile nous semble être une étape logique dans l’évolution des applications hôtelières. Cette tendance qui est déjà fortement ancrée dans le marché en B2B (86% des professionnels en B2B ont utilisé une stratégie de contenu en 2015 selon une étude du Content Marketing Institute[4]), est également en train de transformer les supports digitaux en B2C.
De plus en plus de sites web mettent en avant du contenu inspirationnel sur leur site internet en lien avec leur secteur d’activités.
Il semblerait tout à fait naturel que ce contenu ne reste pas l’apanage des sites web responsive et s’invite dans les applications mobiles, sous des formats peut être plus adaptés (contenus facilement partageables sur les réseaux sociaux, sous formes d’images pour être partagées sur Instagram par exemple).
D’autre part, l’application mobile pourrait aller plus loin en devenant un lieu d’échange et de communication.
L’application peut dès lors s’imaginer comme un moyen de communication supplémentaire entre le client et l’hôtel, et devenir une fois encore une arme pour une meilleure expérience client. En effet, l’application mobile pourrait permettre au client d’entrer facilement en contact avec le personnel de l’hôtel (via un chat par exemple). Cet échange avec l’hôtel pourrait également se manifester à travers un chatbot, permettant de répondre aux interrogations du client et de le guider du son séjour au sein de l’établissement.
Mais l’application peut aussi être pensée comme lieu d’échange entre les différents clients de l’hôtel s’ils le souhaitent. C’est le parti pris par l’enseigne Jo & Joe, qui a pensé son application non plus comme un outil mais comme une part entière de sa stratégie. Jo & Joe axe sa valeur ajoutée sur les rencontres possibles au sein de ses hôtels : l’application Jo & Joe est un réseau social entre membres de l’hôtel avant d’être un canal de vente. Ainsi, la fonctionnalité suggestion “who’s up for” permet à chaque client de l’hôtel de proposer une activité aux autres membres de l’hôtel.
A l’instar de son splash screen - écran de lancement - de 6 secondes (relativement long pour une application [5]), et de son écran d’accueil qui est un fil conversationnel, l’application Jo&Joe est totalement disruptive dans son approche et casse les codes : elle ne place pas le canal de vente au centre, et ne fait pas de la rapidité son fer de lance absolu. Si ce parti pris de l’application Jo&Joe peut sembler à contre-courant, il est symptomatique de grandes évolutions à venir dans le monde des applications mobiles hôtelières.
Plus rapide, plus claire, l’application mobile de demain sera aussi plus inspirante et plus connectée. L’application hôtel est en passe de devenir un lieu d’échange, un réseau social qui rassemble autour d’une communauté. Cette transformation de long terme du contenu et des services proposés est nécessaire face à deux types d’acteurs qui gagnent de plus en plus de parts de marché : Airbnb, qui joue sur l’expérience locale, et les OTA, qui tirent parti de la richesse de l’offre proposée. Tout l’enjeu pour les chaînes hôtelières sera de trouver un bon compromis entre le besoin de proposer plus de services et de partages, et la nécessité de garder ce canal de vente simple et clair pour le client.
[1] Le groupe Fédérations des Logis de France a été écarté du panel de notre étude car ne possède pas d’application mobile. Cette absence d’application mobile peut être relative à sa forme juridique : il s’agit d’une fédération d'hôteliers indépendants et non d’un groupe hôtelier intégré.
[2] Efficacité du canal de vente, pertinence des fonctionnalités proposées, stratégie de services et innovation, et enfin aspects CUX (UI = design de l’application, et UX = expérience utilisateur lors de l’utilisation de l’application).
[3] 9 groupes du panel étudié : AccorHotels, Louvre Hotel, Marriott, Hilton, Choice Hotels, IHG, Best Western, B&B hotels, SEH United Hoteliers.
[4] Etude “2016 Benchmarks, Budgets, and Trends—North America” réalisée en 2016 en Amérique du Nord http://contentmarketinginstitute.com/wp-content/uploads/2015/09/2016_B2B...
[5] Le temps d’affichage d’un splash screen généralement recommandé étant de 2 secondes http://www.wpfsharp.com/2012/02/14/how-to-display-a-splash-screen-for-at... https://ux.stackexchange.com/questions/41976/there-is-an-appropriate-tim...