La reconversion, parent pauvre des politiques d…
À une époque où la célérité de l’avancée technologique ne cesse de croître et où l’intégration des technologies dans le monde de la banque est toujours plus rapide, il est légitime de penser que la relation entre le client et sa banque sera plus que bouleversée dans les années à venir.
Dans ce cadre, Sia Partners vous propose de dresser le portrait prédictif de la distribution des services financiers à horizon 2030.
La distribution bancaire telle qu’elle existe en 2019 repose d’abord sur la décomposition suivante :
La vente directe : les produits financiers sont écoulés au travers d’un maillage territorial d’agences bancaires. Les acteurs qui disposent d’un réseau d’agences sont en quasi-totalité les acteurs traditionnels (Crédit Agricole, BNP Paribas, Société Générale, Caisse d’Epargne…). La tendance de ce maillage est au repli. Les statistiques récentes doivent être perçues, non comme une démonstration de l’absence de pertinence du réseau d’agences à l’avenir, mais comme un signe des transformations en cours et futures, plus globales, de la distribution des services financiers.
La vente à distance : les produits sont principalement vendus sur internet. Ce canal de vente est le plus dynamique, au détriment de la vente physique. Aujourd’hui, tous les acteurs possèdent un site internet et une application mobile. Ces derniers se sont adaptés aux nouvelles pratiques du consommateur. Plus de 50% des souscriptions passeront par des canaux digitaux en 2020 chez les acteurs majeurs français.
La vente omnicanale, alliance d’une vente directe et à distance : elle tend à se généraliser, notamment pour les services à faible valeur ajoutée (exemple : opposition sur la carte)
Cependant, cette décomposition n’est pas stricte et est même de plus en plus remise en cause. En effet, de nouvelles initiatives hybrides se développent pour proposer une offre adaptée aux nouvelles réalités. Nous pouvons par exemple citer Anytime, qui permet à tout venant d’ouvrir un compte bancaire dans des cabines Photomaton. Nous pouvons également évoquer la possibilité, depuis début 2017, pour la quasi-totalité des clients de banques britanniques de réaliser des opérations basiques (retrait d’argent, dépôt de chèques, consultation de comptes…) depuis l’ensemble des bureaux postaux du Royaume Uni.
Dans un monde où Walmart utilise la réalité virtuelle pour permettre à ses clients de faire leurs courses depuis leur canapé, où Carrefour présente certains produits grâce à des hologrammes, où l’utilisation des données personnelles n’a jamais été aussi intensive et où l’intelligence artificielle se présente comme la quatrième révolution industrielle, le paysage de la distribution des services financiers va muter en profondeur. La pression technologique, conjuguée à une évolution des besoins clients actuels vers plus d’autonomie, de personnalisation, de simplicité et d’expertise, poursuivra la remise en cause des modalités actuelles de la distribution des services financiers. Dès lors, quelles seront les principaux enjeux de la distribution en 2030 ? Comment se matérialisera la distribution à cette date ? Quels nouveaux défis les différents acteurs devront relever pour poursuivre cette activité ?
Comme évoqué plus haut, de plus en plus d’acteurs s’insèrent sur le marché de la distribution des produits et services financiers. Cette évolution est notamment liée à une volonté politique d’ouvrir la distribution de ces produits à de nouveaux acteurs afin de faire baisser le coût des services financier. Cette volonté politique se traduit par différentes règlementations publiées ces dernières années, dont la deuxième directive sur les paiements (DSP 2), qui ouvre l’ère de l’Open Banking, en est le symbole. Cette directive impose aux banques traditionnelles d’ouvrir leurs systèmes d’information pour l’agrégation de comptes bancaires et l’initiation de paiement. De ce fait, elle permet à de nouveaux acteurs de distribuer ces services sans avoir à les assurer eux-mêmes.
Il existe depuis plusieurs années de nombreux sites qui comparent les services financiers proposés par les différentes banques. Prenons l’exemple du site Panorabanques qui propose un parcours utilisateur personnalisé et innovant :
Le processus s’arrête aujourd’hui à la proposition de mise en relation. La conviction de Sia Partners est qu’en 2030, ce type de site internet distribuera directement les offres des banques grâce à l’Open Banking. Les produits financiers seront distribués via quelques plateformes qui rassembleront les produits de tous les acteurs. Ce mode plateformisé de distribution sera d’autant plus pertinent qu’il utilisera le big data et l’intelligence artificielle afin d’affiner la connaissance des clients. En définitive, le mode de distribution sera très proche de ce que l’on connait déjà dans le secteur du divertissement avec Netflix ou de l’hôtellerie avec Booking.
Cependant, les acteurs financiers ne posséderont pas le monopole de la distribution des services financiers. En effet, les acteurs du commerce seront amenés à distribuer des produits financiers. Le postulat de départ est le suivant : le client souhaite que son parcours jusqu’à l’étape à laquelle il bénéficie réellement du bien ou du service soit simple et rapide. Pour arriver à satisfaire cette nouvelle demande de la clientèle, de nombreux commerçants gagneront à intégrer la brique financière au sein du parcours client qu’il propose. Cela est vrai pour les commerçants qui vendent des produits ou services à des prix élevés qui peuvent nécessiter un financement. Par exemple, un client qui souhaite déléguer l’organisation de son mariage à une agence spécialisée dans l’évènementiel doit, en parallèle, s’occuper de la question du financement de son mariage. Sia Partners a la conviction que demain ce type d’acteur sera amené à intégrer la souscription au produit financier inhérent au produit distribué au sein du parcours client.
Il est vrai que les agences bancaires commercialisent des produits qui ne sont pas tangibles. A priori, cela limite donc significativement l’usage que les banques pourraient faire de la technologie de la réalité virtuelle dans sa relation avec le client. Néanmoins, l’immersion permise par la réalité virtuelle peut donner à la banque l’opportunité de fournir une réelle expérience client virtuelle et personnalisée. Cela pourrait permettre au client d’inviter les services de la banque chez lui grâce à l’utilisation de son casque VR personnel. Il pourrait ainsi rencontrer un conseiller virtuel à l’apparence humaine comme le propose déjà la banque australienne Ubank. Il pourrait le rencontrer sur le lieu de son choix (lieu de vacances, travail, …) afin de personnaliser sa propre expérience client. Utiliser la technologie de la réalité virtuelle serait ainsi un facteur différenciant pour la banque et améliorerait l’expérience client.
A contrario, l’utilisation des hologrammes par les distributeurs de services financiers semble moins pertinente pour réinventer la relation client. Contrairement à la réalité virtuelle, cette technologie n’a aucun potentiel immersif pour la clientèle. Elle représente un coût un peu plus élevé et pourrait n’être utilisée qu’en agences, au moins dans un premier temps. Ces hologrammes s’avèreraient utiles pour humaniser la rencontre entre le client et un conseiller qui se trouve à distance. Par exemple, un client pourrait s’installer dans une salle équipée de cette technologie afin de rencontrer un expert en produits financiers.
Compte tenu de l’augmentation exponentielle de la quantité de données produites par chacun d’entre nous, l’un des grands enjeux de l’évolution des services financiers sera le service sur mesure. La personnalisation impactera non seulement les produits mais également la manière dont ils seront distribués. La start-up DataSyne travaille déjà sur cette thématique. En effet, en se branchant sur les informations du compte bancaire d’un client, elle est en mesure de dresser un portrait psychologique de ce dernier. En fonction du profil du client, cette start-up, qui travaille en association avec la banque BNP Paribas, propose d’adapter la promotion de certains produits auprès du client. Par exemple, le client destinataire d’un mailing recevra un courrier électronique customisé. S’il est plutôt reconnu comme extraverti par l’algorithme, la communication qu’il recevra comportera comme illustration un groupe de personnes. A l’inverse, s’il est identifié comme introverti, il recevra en illustration une personne confortablement installée chez elle. Le code couleur peut également varier en fonction du profil psychologique du client. Ce type d’initiative fait partie de l’avenir du fonctionnement des banques. Grâce à l’analyse des données, les banques s’orienteront vers une stratégie customer-centric dans le but de perpétuellement améliorer la satisfaction du client grâce à une connaissance toujours plus fine de ce dernier.
Les nouveaux outils technologiques auront pour effet de remodeler le rôle du conseiller bancaire. Au Crédit Mutuel, des bots développés par IBM répondent automatiquement aux mails des clients qui traitent de sujets simples. Chez Orange Bank, l’assistant vocal Djingo réalise près de 24 000 conversations par semaine avec les clients pour répondre aux questions générales sur la banque et ses offres mais aussi pour traiter certaines demandes comme le blocage de la carte de paiement. Le renforcement de ces technologies -encore assez peu performantes globalement à l’heure actuelle -, dans les prochaines années va permettre au conseiller de se libérer de ses tâches répétitives et administratives quotidiennes. Le conseiller se verra ainsi octroyé plus de temps pour dispenser des conseils sur des sujets plus techniques. En 2030, les fonctions du conseiller seront recentrées sur les demandes techniques et spécifiques de la clientèle. Fort des nouveaux outils d’analyse performants mis à sa disposition, le conseiller sera en mesure de faire des propositions qui seront parfaitement adéquates avec le profil de son client. Le conseiller du futur aura plus que jamais une posture d’expert. En résumé, les banques ont intérêt à renforcer l’humain qui restera indispensable pour dispenser un conseil technique, faire preuve d’empathie, gérer le relationnel et négocier. Néanmoins, une partie des activités actuelles du conseiller seront déléguées à l’intelligence artificielle.
Dans une décennie, les principaux enjeux de la distribution se situeront dans la capacité des acteurs à s’adapter à la désintermédiation, à virtualiser et personnaliser l’expérience client et à déterminer les nouveaux domaines de compétences du conseiller bancaire. Afin d’illustrer les concepts introduits jusqu’ici et de concrétiser le propos, nous vous propose de prendre connaissance du visage qu’aura le parcours client en 2030.
Ce schéma illustre une réalité qui n’est pas si éloignée. Une mutation en profondeur est à prévoir. Dès lors, anticiper l’arrivée de ces nouveaux enjeux est une obligation pour tout acteur qui souhaite s’inscrire durablement sur le marché des services financiers. Trouver des réponses à ces défis de demain sera très rapidement une nécessité.