La reconversion, parent pauvre des politiques d…
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Les projets agrivoltaïques lauréats des appels à projets de la CRE se multiplient, passant de 15MW en février 2018 à 45MW en avril 2020. Focus sur ce concept, prometteur pour les développeurs de projets photovoltaïques (PV) en quête de leviers de croissance pérennes comme pour les exploitants agricoles à la recherche de solutions face aux bouleversements climatiques.
Maintenir la vocation agricole des terres, en préservant les cultures des effets du changement climatique tout en produisant de l’électricité renouvelable est le défi de l’agrivoltaïsme. Il s’agit de faire cohabiter sur une même surface une production agricole - élevage, maraîchage, arboriculture ou grandes cultures - avec des panneaux PV pilotables montés sur des structures de plusieurs mètres de haut et suffisamment espacés pour permettre le passage des machines agricoles. Étudié dès les années 1980 et déployé à grande échelle à partir de 2004 au Japon, ce procédé est désormais expérimenté partout dans le monde.
Les exploitations agricoles accueillent 13 % des installations PV (principalement des panneaux sur toiture / serres ou des centrales au sol dans des pacages ovins) en France pour un chiffre d’affaire de 109 millions d’euros (1). Cette contribution pourrait doubler d’ici à 2030 avec le lancement du Plan Solaire par le gouvernement. Afin d’atteindre entre 35,6 et 44,5 GW de production solaire d’ici 2028, une augmentation de 30 % des volumes d’appels d’offres pour l’agrivoltaïsme ainsi qu’une subvention à hauteur de 40% du coût de raccordement au réseau des installations PV en milieu agricole est ainsi engagée (2). En tant que premier producteur de produits agricoles en Europe, la France est bien placée pour être un leader européen de l'énergie agrivoltaïque même si les projets sont encore souvent en phase pilote.
Confrontés au changement climatique et à l’augmentation des aléas climatiques, les agriculteurs cherchent des solutions pour pérenniser leurs productions. L’agrivoltaïsme apparaît comme une solution prometteuse. Depuis une décennie, l’état des sols, des champs et la qualité des productions de parcelles cultivées sous panneaux photovoltaïques font l’objet de recherches par l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRAE). De nombreux bénéfices pour les cultures sont observés :
Enfin, l’impact sur le bien-être physique et social des agriculteurs n’est pas négligeable, avec une atmosphère moins étouffante lors des travaux des champs.
Il est à noter que la rentabilité, non négligeable, est variable selon les cultures. Certaines se prêtent particulièrement bien à l’agrivoltaïsme telles que la vigne, les productions fruitières (tomates, baies) et les cultures maraîchères. Sous PV, le blé a ainsi des rendements qui peuvent augmenter de 3 à 70%, tandis que la production de céleri est stimulée de 12% (3).
En France, la filière agrovoltaïque a commencé à se structurer à la fin des années 2000. Des acteurs pionniers comme Sun’R ou Akuo avaient dès lors commencé à mettre en place des écosystèmes afin de se positionner sur ce créneau porteur sur le long terme.
Le projet de Sun’Agri (filiale de Sun’R), mis en place en partenariat avec l’INRA, a par exemple commencé en 2009 avec une maturité envisagée en 2022. Avec l’objectif de multiplier par 5 son chiffre d’affaire pour les 5 prochaines années, Sun’Agri est lauréat, avec 33 MW, de 75 % des projets agrovoltaïques de l’appel d’offres innovation de la CRE d’avril 2020. D’autres acteurs émergent avec des technologies innovantes et des partenariats avec des acteurs de premier plan du monde de l‘agriculture. A titre d’exemple, Total s’est positionné en signant en mars 2020, via sa filiale Total Quadran, un partenariat avec le Groupe InVivo. Cette union nationale de coopérative agricole, regroupant plus de 300 000 exploitants, a permis d’identifier 200 hectares de terrains agricoles pouvant potentiellement bénéficier des installations solaires.
Les acteurs de la filière agrivoltaïque ont intégré les transformations à engager. Au-delà des aspects techniques classiques et ceux relatifs aux montages juridiques, administratifs et financiers, les développeurs de projet développent des compétences sur les facteurs clés de succès qui les différencient durablement de leurs concurrents.
Ce domaine en extension est récemment marqué par des innovations à différents niveaux, la capacité à déployer des innovations de rupture permettant de différencier l’offre d’une entreprise.
L’agrivoltaïsme n'est qu'au début de son développement.
Les résultats dans le cadre des appels d’offres solaires innovants de la CRE et l’intérêt marqué d’acteurs majeurs semblent être des signes précurseurs du succès de ce concept. Le prochain appel d’offre portant sur la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à partir de l’énergie solaire « Centrales au sol » de la 9ème période se clôture le 3 novembre 2020. Cette conclusion est partagée par de plus en plus d’acteurs qui se positionnent sur ce créneau, avec le soutien des Directions Régionales de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement (DREAL) ou encore les Agences Régionales Energie Climat (AREC).
Pour améliorer la lisibilité des expérimentations, l'Ademe vient d'initier une vaste étude nationale pour établir un état des lieux exhaustif de cette pratique et des multiples modèles économiques possibles. Les résultats de cet état des lieux seront connus au printemps 2021.
Conscient de la pertinence de nombre de ces projets, l’Etat affiche d’ores et déjà un soutien fort à la recherche et au développement dans ce domaine.
Une analyse de Solène Vanderspeeten